Défaut de prise en charge d'une douleur thoracique persistante

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Défaut de prise en charge d'une douleur thoracique persistante - Cas clinique

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Un patient de 49 ans, professeur de tennis, fumeur de longue date, ressent brutalement une douleur thoracique gauche postérieure en donnant un cours de tennis, lors d’un geste de revers...

  • Médecin
Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 17/06/2020

Cas clinique

  • Patient de 49 ans, professeur de tennis.  
  • Tabagisme ancien (plus d’un paquet / jour).  
  • Le 2 avril, vers 10 heures, alors qu’il donne un cours de tennis, survenue brutale, lors d’un geste de revers, d’une douleur thoracique gauche postérieure, l’obligeant à arrêter la partie car il « ne sentait pas bien ».  
  • Sa femme ayant pris rendez-vous avec un médecin généraliste pour leur fils à 11 heures, il décide de l’accompagner bien que ce praticien ne soit pas son médecin traitant. En l’absence d’anomalies à l’examen clinique (notamment, PA : 120 / 70 mmHg), celui-ci conclut à une déchirure musculaire et prescrit un traitement décontracturant par Myolastan® et Miorel®. NB : Interrogé plus tard lors de l’expertise, il ajoutera que « la douleur thoracique apparaissait en voie d’atténuation et que le patient ne semblait souffrir que modérément ». Mais l’épouse du patient qui assistait à la consultation déclarait que « son époux, tout au cours de l’examen, était défiguré et livide en raison de l’importance des phénomènes douloureux thoraciques ».  
  • Le patient regagne son club de tennis où il doit donner un cours à 12 h 30 à… son médecin traitant. D’un commun accord, compte tenu de l’importance des phénomènes douloureux, le cours est annulé. Mais le patient en profite pour lui demander son avis sur les décisions du praticien qu’il vient de consulter. Ce dernier le rassure, mais n’ayant pas sa trousse, ne peut l’examiner. Il lui propose de donner des nouvelles après avoir pris le traitement prescrit. NB : Interrogé plus tard lors de l’expertise, le médecin traitant déclarera que le patient n’était pas essoufflé et qu’il avait discuté normalement en restant assis sur le tabouret de bar du club-house.  
  • Vers 15 heures, le patient regagne son domicile.  
  • A 16h30, le patient rappelle son médecin traitant en raison de l’absence d’amélioration malgré le repos et la thérapeutique d’autant qu’il n’arrive plus à trouver de position antalgique. Il lui demande s’il pouvait prendre un autre antalgique. Son médecin traitant lui conseille de prendre du Diantalvic®.  
  • Dans la soirée, l’épouse du patient inquiète de la persistance des douleurs appelle le SAMU. Le médecin régulateur lui communique le numéro d’appel du médecin de garde qui arrive sur place vers 21h . Il s’agit d’un généraliste, médecin du sport qui connait le patient avec lequel lui et ses enfants prennent des cours de tennis. Après l’avoir interrogé, il examine le patient, retrouve une PA à 120 / 70 mmHg et une douleur exquise à la pression des épineuses de D7 et D8. Après examen du rachis dorso-lombaire, il pratique, en position assise quelques manipulations du rachis cervical, le patient se sentant légèrement soulagé. Au bout d’une demi-heure, il rédige une ordonnance prescrivant le repos avec prise de Myolastan® en laissant son numéro de portable pour le rappeler dans la nuit s’il n’y a pas d’amélioration et aurait préconisé une nouvelle consultation avec son associé pour le lendemain, lui-même devant partir en vacances. Il n’établit pas de fiche de consultation puisqu’il s’agit d’une « visite de nuit effectuée en urgence ».  
  • Le lendemain matin, ne se sentant ni mieux, ni moins bien, le patient annonce à sa femme qu’il va profiter de cette journée de repos pour jardiner. A 13h00, de retour de courses, elle le découvre mort dans la salle de bains de leur maison.L’autopsie conclut à «une dissection aortique touchant l’aorte thoracique juste au-dessus des valvules de l’orifice aortique avec hémopéricarde…, lésions de congestion passive des viscères (poumons, foie, rate, reins,…) dues à des phénomènes de stase par obstruction du retour veineux en rapport avec l’hémopéricarde…Par ailleurs, lésions diffuses d’athérome à différents stades. » Le décès est attribué à une tamponnade faisant suite à une dissection aortique de type I.

ASSIGNATION des 3 MEDECINS GENERALISTES consultés par le patient par son épouse en réparation du préjudice qu’elle avait subi ainsi que ses enfants.

Analyse

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Jugement

Expertise (2007)

L'expert, médecin généraliste, assisté d’un sapiteur professeur des universités chirurgien cardiovasculaire, était d’avis que « (…) le patient avait vraisemblablement été victime d’une fissuration de l’aorte ascendante le 2 avril  expliquant les douleurs persistantes non soulagées par une position antalgique, ni par les médicaments prescrits. Il semblait que la dissection soit survenue  brutalement dans la matinée du 3 mars entraînant un décès immédiat sans possibilité pour le patient d’appeler  des secours (…) »

Pour l’expert, «  (…) compte tenu de l’âge du patient (49 ans), d’un tabagisme ancien et important, de la localisation de la douleur (thoracique postérieure), de son intensité, de l’absence de position antalgique, des examens complémentaires auraient pu être demandés par le médecin généraliste consulté le 2 mars ou celui avec lequel le patient s’était entretenu peu après au club de tennis. En revanche, ces mêmes examens s’imposaient lors de la visite du médecin de garde qui s’était contenté de pratiquer des thérapeutiques manuelles non conformes à l’art médical (..) ».

En conclusion, l’expert estimait que «  (…)  le 2 avril, les soins et actes médicaux prodigués au patient n’avaient pas été conformes aux données acquises de la science et que des négligences  (absence d’examens complémentaires et/ou d’hospitalisation)  avaient été commises, entraînant une perte de chance de survie pour celui-ci (...) ». Le sapiteur estimait que, « (…) si le patient avait pu être opéré de sa dissection le 2 avril, on pouvait estimer à 75% ses chances de survie à l’intervention et à 55% celles d’être survivant à 10 ans, tout en menant une vie normale pendant cette période (..) ».

 

Tribunal de Grande Instance

Les magistrats considéraient que « (…) le médecin généraliste consulté le 2 avril, n’avait pas prêté suffisamment d’attention ou n’avait pas su interpréter certains signes (absence de position antalgique, aspect livide du patient, importance de la douleur thoracique postérieure). Il aurait dû, ne serait-ce que par précaution, faire conduire  le patient dans un centre hospitalier pour  y subir des examens cardio-vasculaires.

Le médecin de garde aurait dû être alerté par la persistance des douleurs malgré la prise d’antalgiques  et rechercher un lien avec une pathologie cardio-vasculaire. Il devait prescrire une hospitalisation immédiate  et non effectuer  des manipulations parfaitement inutiles.

En revanche, au club-house, les conseils du médecin traitant avaient été prudents et limités, préconisant de suivre le traitement prescrit et de consulter un médecin si les douleurs persistaient après  la prise des antalgiques. Il n’était pas établi que, dans le cadre particulier de son intervention, laquelle excluait un contrat de  soins, ce médecin ait  commis une faute qui aurait été à l’origine du décès du patient (..) ».

En conclusion, les magistrats jugeaient  que les fautes commises par les deux autres médecins engageaient leur responsabilité et qu’elles avaient entraîné pour le patient une  perte de chance de survie évaluée  à 41,25% (75% x 55%). Ils les condamnaient, in solidum, à réparer le préjudice subi  par  les proches du patient. 

Indemnisation de  82875  €.

 

Aller plus loin

1) Staeger P, Meier F, Fishman D, Douleur thoracique, Med Hyg  2002 (septembre), 2404 : 1624-1637
2) Le risque cardio-vasculaire, J.L. SCHLIENGER (Strasbourg) 
 

1 Commentaire
  • LarryTut L 14/12/2020

    Les nouveaux outils numérique devrait nous permettre de passer la crise sanitaire, comme la <a href=https://www.maquestionmedicale.fr/>consultation en ligne</a>, efficace pour pas se déplacer chez son médecin avec le covid.

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