Hématome compressif après stripping saphène externe

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Hématome compressif après stripping saphène externe - Cas clinique

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Quand une intervention chirurgicale (stripping de la saphène externe gauche) aboutit à une paralysie complète des loges de la jambe...

  • Chirurgien
Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 17/06/2020

Cas clinique

• Femme âgée de 51 ans se plaignant de douleurs des membres inférieurs avec sensation de lourdeur ainsi que d’une hypodermite bilatérale. L’écho Doppler confirme une incontinence saphène interne droite et saphène externe gauche de type ostial. Un traitement par veinotonique et contention élastique est proposé. En l’absence d’amélioration, le médecin traitant adresse la patiente, le 18 septembre, à un chirurgien qui propose un éveinage saphène externe gauche.

• Le 26 septembre, le chirurgien effectue un marquage pré-opératoire : la marque A représentant la crosse et la marque B étant située dans la région sus-malléolaire externe du membre inférieur gauche.

• L’intervention a lieu le jour même sous anesthésie péridurale. Elle consiste en un stripping complet de la saphène externe gauche qui se déroule sans incident. En fin d’intervention, le chirurgien met en place une contention élastique par bandes Biflex®.Il écrit sur le pansement que celui-ci doit être enlevé au bout de 2 heures, en conformité avec le protocole affiché dans la salle de réveil de la clinique qui prescrit pour ce type d’intervention : « La première bande doit être enlevée impérativement dès la deuxième heure. La deuxième reste en place. Surveillance locale des extrémités, chaleur et sensibilité ».

• Après un court séjour en salle de réveil, la patiente est ramenée, vers 11h30, dans sa chambre où elle est prise en charge par l’infirmière de jour.

• La patiente soulignera qu’elle n’a vu ni le chirurgien, ni l’anesthésiste dans l’après-midi.

• Selon l’accord passé entre les médecins, c’était l’anesthésiste qui doit passer dans l’après-midi pour vérifier « qu’il n’y a pas de problème », mais il ne visite que les patients qui lui sont signalés par les infirmières. C’est pour cette raison qu’il ne s’est pas rendu auprès de la patiente. Celle-ci dit pourtant s’être plainte de douleurs du membre inférieur gauche dès l’après-midi mais sans que cela soit consigné dans le cahier de surveillance. D’après le rapport du cadre infirmier, ce n’est que dans la nuit que l’infirmière de garde note ces plaintes et découvre que la bande de contention n’a pas été désserrée comme l’avait demandé le chirurgien et comme indiqué dans le protocole postopératoire.

• Le matin, à la transmission, l’infirmière de nuit fait part de ce fait. Lors de sa visite, vers 13h30, le chirurgien est informé de cette situation. Il enlève les bandes et constate que le membre inférieur gauche est œdèmatié et bleu. Posant le diagnostic d’ischémie aiguë en relation avec un bandage serré laissé en place trop longtemps, il demande un écho Doppler artériel et veineux du membre inférieur gauche. L’examen montre que les flux artériels sont modulés et qu’il n’y a pas de thrombose veineuse crurale. L’importance de l’œdème du mollet ne permet pas d’apprécier l’existence d’une thrombose veineuse surale.

• Le chirurgien fait alors transférer en urgence la patiente dans le service de chirurgie cardio-vasculaire du CHU où est débutée une héparinothérapie. L’ischémie régresse rapidement mais il est constaté une paralysie du sciatique poplité externe gauche.

• Le 5 octobre, en raison de l’amélioration de son état, la patiente est transférée dans le service de rééducation où est notée une desquamation complète de toute la zone œdèmatiée de la jambe et du pied.

• Elle quitte le CHU le 26 octobre pour regagner la clinique avec la poursuite d’un traitement par AVK (arrêté en avril de l’année suivante) et des soins de rééducation quotidiens.

• Le 8 novembre, l’examen par un neurologue conclut : « A un mois et demi, persistance d’une paralysie complète des loges de la jambe et pas seulement du sciatique poplité externe. Le problème n’est pas uniquement neurologique dans la mesure où les troubles de la sensibilité se sont améliorés, mais essentiellement musculaire. Il n’y a pas de geste chirurgical à envisager pour l’instant mais une rééducation intensive avec reprise de la marche, drainage de l’œdème résiduel, éventuellement appareillage avec un anti-équin une fois que la cheville se sera assouplie. »

• En mai, survient un épisode inflammatoire de la jambe gauche, traitée par antibiothérapie.

• En juin, un électromyographie confirme l’atteinte des deux sciatiques poplités et des muscles de la jambe.

Assignation du chirurgien et de la clinique par la patiente en réparation du préjudice qu’elle avait subi.
 

Jugement

Expertise

 

L’expert, professeur des universités, chef de service de médecine interne et d’angiologie,  estime que le chirurgien a donné à sa patiente des soins vigilants et conformes aux données actuelles de la science. En revanche, il n’en était pas de même de la clinique dont le personnel infirmier n’avait pas exécuté les ordres explicites du chirurgien. Ce manquement avait eu pour conséquence une ischémie neuromusculaire sévère de la jambe gauche.

IPP évaluée à 15% avec un pretium doloris de 3/7 et un préjudice esthétique de 2/7.

 

Tribunal de Grande Instance (novembre 2010)

 

A l’instar de l’expert, les magistrats estimaient qu’aucune faute ne pouvait être reprochée au chirurgien et le mettait hors de cause.

En revanche, ils jugeaient que : « (…) L’infirmière de jour n’avait pas apporté à la patiente l’attention nécessitée par son état ; qu’en effet, un simple examen de cette dernière aurait suffi à attirer son attention sur le bandage où le chirurgien avait pris soin de noter ses instructions ; que, même à supposer que ces dernières aient pu être difficilement lisibles, leur simple présence, rapportée aux plaintes de la patiente , aurait dû l’interpeller et l’amener à consulter le protocole affiché dans la clinique, voire à solliciter l’intervention du médecin anesthésiste présent dans l’après-midi ; qu’enfin, une fois relevé le manquement au protocole post- opératoire, la gravité de la situation a été singulièrement sous-estimée par l’ensemble du personnel soignant puisque plusieurs heures se sont écoulées avant que le chirurgien n’en soit informé, ce qui a retardé  d’autant la prise en charge thérapeutique de ce que l’expert a dénommé un état d’ischémie sévère du membre inférieur gauche (…) » Pour ces raisons, le tribunal estimait que la responsabilité de la clinique se trouvait engagée par l’ensemble des fautes commises par ses préposés.

 

Indemnisation de 107 047 €

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