Prévention bucco-dentaire chez la personne âgée : les bonnes pratiques

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Cet article regroupe des recommandations à adopter pour réduire les risques de problèmes dentaires causés par l'âge.

Auteur : La Prévention médicale / MAJ : 05/03/2019

1. Un bon régime alimentaire

Il existe une corrélation directe entre l’alimentation et les problèmes dentaires. La diminution de la fonction protectrice de la salive due à la senescence des glandes salivaires joue un rôle important dans le développement du processus carieux2, c’est pourquoi il est recommandé de boire un litre d’eau par jour afin de stimuler les glandes salivaires4

Par ailleurs, du fait que la fréquence de consommation d’aliments cariogènes est plus délétère que celle de leur quantité totale pendant le repas (« beaucoup de sucre en une prise est moins nocive pour la santé bucco-dentaire que peu de sucre réparti en plusieurs prises sur toute la journée »), le "grignotage" doit être évité.

Enfin, il faut rappeler que le potentiel cariogénique des aliments est lié à leur teneur en hydrates de carbone (sucres). On retrouve classiquement dans l’alimentation le glucose et le fructose, le saccharose, le maltose, le lactose et l’amidon. Le plus courant est le saccharose ; c’est aussi le plus cariogénique. Le lactose est le moins cariogénique.
Les substituts non caloriques du saccharose sont non cariogéniques. La saccharine, le cyclamate, la thaumatine, l’acésulfam K et l’aspartame sont utilisés comme édulcorants dans les boissons. Les alcools de sucre comme le sorbitol ont un potentiel cariogénique faible et celui du xylitol est nul4.

Le caractère « collant » des aliments sucrés (comme les caramels, les biscuits, les pâtisseries et les chips) est un facteur de risque. En effet, sans brossage, l’hydrate de carbone séjourne plus longtemps dans la cavité buccale. Ainsi, les aliments de consistance fibreuse (tels que les fruits et les légumes) sont peu cariogènes, car ils sont plus rapidement éliminés.
Il faut donc privilégier une alimentation peu collante et pauvre en sucre comme le pain ou les céréales (sans sucre ajouté), surtout si un nettoyage de la cavité buccale n’est pas possible4.

La consommation d’alcool et de tabac est déconseillée pour prévenir les  lésions potentiellement malignes11,12-21.

2. Un nettoyage régulier avec un matériel adapté

Il concerne aussi bien la cavité buccale que les prothèses amovibles et doit être réalisé de façon séparée, si possible après chaque repas.
Il faut garder en mémoire que les muqueuses sont fragiles et que le nettoyage de la cavité buccale, la dépose ou la mise en place des appareils peut générer des douleurs ou des blessures. Les gestes doivent donc être réalisés en douceur.

1. Nettoyage de la cavité buccale

Un brossage régulier et en douceur permet d’éliminer la plaque dentaire et les débris alimentaires contenant les bactéries responsables de la mauvaise haleine, des caries et des maladies parodontales et permet ainsi de conserver des dents saines le plus longtemps possible.

Choix de brosse à dents :

Il faut choisir une brosse à dents électrique ou manuelle de qualité, sélectionnée en fonction du degré d’inflammation gingivale, de la sensibilité dentinaire et de la dextérité de l’utilisateur. Le dentifrice doit être adapté aux problèmes rencontrés (antiseptique, anti-inflammatoire si les gencives sensibles ou irritées ; fluoré si le risque est carieux, ou un dentifrice pour dents sensibles si des douleurs sont ressenties).

Les techniques de brossage « classiques » :

  • la technique du "rouleau" pour brosser les dents et les gencives consiste à placer la brosse contre le sillon gingival à 45 degrés et à effectuer, grâce à la torsion du poignet, un mouvement de balayage de la gencive vers la dent,
  • la technique de "bass” consiste à positionner la tête de la brosse à 45 degrés au niveau du sillon gingivo- dentaire, inclinée du haut vers la gencive, et à pratiquer des petits mouvements en secousses,
  • la technique de "charter”, quasiment identique à la précédente, consiste à placer la tête de la brosse à 45 degrés, les brins étant toutefois dirigés vers les dents. Il est également possible d’effectuer de petits mouvements circulaires.

Les matériels complémentaires :*

Le port de prothèses ainsi que la caractéristique des espaces interdentaires2 rendent la denture difficile à nettoyer. En fonction de l’état bucco-dentaire, de la dextérité de l’utilisateur, de la motivation et de la coopération du patient, du matériel spécifique peut être utilisé4 :

  • des brossettes interdentaires afin de déloger les résidus restés coincés dans les espaces interdentaires,
  • du fil dentaire pour nettoyer les surfaces interproximales des dents,
  • des jets dentaires ou hydro-propulseurs pour éliminer les débris alimentaires.

Lorsque le brossage n’est pas possible, et si  l’état dentaire et des restauration prothétiques existantes le permettent, l’utilisation de gommes à mâcher sans sucres peut être utile4. A défaut,  une partie des débris alimentaires qui se sont accumulés au cours du repas peut être éliminée en buvant avec un verre d’eau1,4.

Lorsque le sujet perd son autonomie, l’entourage ou le personnel soignant effectue le nettoyage de la cavité buccale en fonction du contexte général : la fatigabilité, la survenue de douleur, des nausées, les difficultés de mobilisation, la spaticité…6,7 

Deux cas de figures sont décrits :

  • Le patient capable de cracher et de rincer sa bouche :

- Il est installé en position assise, bouche entrouverte.

- Le soignant (droitier) est à côté du patient (à sa droite), son bras (gauche) cale la tête du patient et sa main (gauche) soutient la mandibule du patient.

- Le brossage est réalisé avec la brosse sur laquelle a été préalablement déposé le dentifrice.

- À la fin du brossage la bouche est rincée à l'eau, et les lèvres séchées.

- L'utilisation d'un bain de bouche au bicarbonate (1,4%) permet de diminuer l’acidité buccale et prévenir l'apparition de mycose.

  • Le patient incapable de cracher et de rincer sa bouche et/ou le patient atteint de trouble de la déglutition et/ou le patient opposant et/ ou le patient refusant d’ouvrir la bouche et/ou le patient en soins palliatifs :

- Le patient est allongé, installé en position latérale de 3/4, tête penchée du côté du soignant, bouche fermée.

- Le soignant (droitier) est à côté du patient (à sa droite), son bras (gauche) cale la tête du patient et sa main gauche soutient la mandibule du patient.

- Le brossage est réalisé en glissant la brosse à dents imbibée d'eau ou de bicarbonate dans une bouche entrouverte (sans demander une grande ouverture de la bouche du patient).

- À la fin du brossage de passage une compresse imbibée d’eau ou de bicarbonate sur la face externe des dents permet de récupérer, d'éliminer des résidus de brossage. Les lèvres doivent être séchées.

L’utilisation de bains de bouche est utile pour réduire l’inflammation gingivale et la prévalence des caries, des maladies parodontale et des candidoses1,4,7.

  • Les bains de bouche anti-inflammatoires sont utilisés en cas d’inflammation et de saignement des gencives, provoqués. Ils contiennent souvent de l’énoxolone ou de l’acide salicylique. L’absence de fluor et d’antiseptique dans leur formule doit cependant limiter leur utilisation à un usage ponctuel symptomatique destiné seulement à soulager l’irritation. En effet, la cause de l’inflammation ou du saignement est le plus souvent liée à une surcharge bactérienne buccale due à une accumulation de plaque dentaire, et doit être prise en charge par un antiseptique et/ ou des soins spécifiques4
  • Les bains de bouche antiseptiques sont destinés à réduire le nombre de bactéries, donc à diminuer les infections, les gingivites et la mauvaise haleine. L’antiseptique de référence est la chlorhexidine. Les autres antiseptiques sont l’hexétidine, l’association fluorure d’étain/fluorure d’amines, la povidone iodée… Ils peuvent être avec ou sans alcool, à diluer ou non avant utilisation, et contenir ou non un agent anesthésique. La dilution peut être utile pour modifier la température de bain de bouche en cas d’hypersensibilité, mais elle impose une manipulation supplémentaire. Les bains de bouche antiseptiques doivent être utilisés généralement sur une durée courte (de l’ordre de moins de 7 jours en post-chirurgie ou en cas d’infection aiguë à 15 jours dans les gingivites/parodontites), car ils peuvent engendrer un déséquilibre de la flore microbienne buccale4.
  • Les bains de bouche neutralisant la mauvaise haleine agissent principalement sur le développement des bactéries au niveau de la langue et des gencives. Les antiseptiques sont souvent associés aux agents neutralisant les enzymes produisant les composés sulfurés volatils comme les huiles essentielles et le lactate de zinc qui neutralise les composés sulfurés volatils8.
  • Les bains de bouche fluorés luttent contre les caries.
  • Les bains de bouche au bicarbonate (1,4%) permettent de diminuer l’acidité buccale et prévenir l'apparition de mycose.

2. Patient porteur de Prothèses

Nettoyage des prothèses

L’environnement sous-prothétique est propice à l’apparition d’une candidose. Les symptômes associés (perte de goût, sécheresse buccale, sensation de type brûlure…) peuvent nuire au port des prothèses, et ainsi compliquer la mastication. Des antifongiques (topiques et/ou systémiques) sont couramment prescrits pour traiter la candidose sous-prothétique, mais la prévalence des micro-organismes résistants à ces agents augmente, rendant les options thérapeutiques inefficaces, d’où l’importance des mesures préventives8.

S’il n’existe pas de consensus sur l’efficacité réelle et prouvée d’une technique d’hygiène des prothèses dentaires amovibles par rapport à une autre, l’ensemble des auteurs s’accordent pour préconiser le brossage des prothèses amovibles comme geste principal. L'utilisation de comprimés effervescents apporte du confort mais ne saurait remplacer le geste7,9,10.

Le brossage des prothèses doit être réalisé avec une brosse à dents à poils durs et du savon liquide au pH neutre et sans parfum durs et suivi d’un rinçage soigneux à l’eau pour éliminer le détergent et les résidus. Pour éviter la fracture de la prothèse en cas de chute, ces gestes doivent être effectués au-dessus d’un lavabo rempli d’eau ou garni d’un tissu éponge.

De nombreux produits existent sur le marché pour compléter l’action mécanique du brossage par une action chimique :

  • Savon :  Ce peut être du savon de Marseille (liquide ou en pain)9;
  • Le dentifrice est déconseillé pour les prothèses car il dépolit la résine et la rend poreuse et donc plus propice à l’envahissement microbien. Il est à réserver uniquement aux dents restant en bouche9 ;
  • La chlorhexidine, bien que fongicide, elle colore les résines en brun si son usage est trop répétitif9 ;
  • Bicarbonate de sodium à 1,4 % : cette solution peut être obtenue en dissolvant 2,8 g de poudre de bicarbonate de sodium (soit 1 cuillère à café) dans 100 ml d’eau (1 verre)6,9 ;
  • Hypochlorite de sodium est fongicide, mais peut provoquer une décoloration de la prothèse. Un berlingot d’eau de Javel doit être dilué dans un bidon de 5 litres d’eau. Le temps de trempage est de 5 minutes. Un rinçage rigoureux est particulièrement nécessaire. L’utilisation de l’hypochlorite de sodium est plus adaptée en collectivité qu’en ambulatoire9 ;
  • Peroxydes alcalins : La libération de bulles d’oxygène des comprimés effervescents contenant des peroxydes alcalins permettrait l’élimination facile et rapide des débris et de la plaque9 ;
  • Eau oxygénée : L’eau oxygénée n’est active qu’à des doses très élevées, proches de la toxicité pour les muqueuses9 ;
  • Solutions antiphlogistiques à base de plantes : Fongicides in vitro pour certaines, ces solutions rencontrent un très grand succès mais ne reposent sur aucune donnée clinique fiable9 ;
  • Bac à ultrasons : Les chirurgiens-dentistes, prothésistes et services de gériatrie sont souvent équipés d’un bac à ultrasons. En 10 minutes, ces derniers vont permettre une élimination des dépôts tartriques ainsi qu’une réduction des concentrations fongicides nécessaires de la plupart des antimycotiques ou des antiseptiques Ils permettent ainsi une bonne désinfection des prothèses9,10.

En cas d’utilisation d’adhésif, l’application d’une compresse imbibée d’un corps gras (de type vaseline, huile) facilite l’élimination de la colle. Le brossage est déconseillé pour ne pas encrasser la brosse.

Prévention des lésions traumatiques

Pour éviter les blessures l’adaptation des prothèses est indispensable. La réfection des bases, la suppression des bords traumatisants, l’ajustage des crochets, le polissage soigneux des surfaces sont nécessaires.

Le recours à des crèmes adhésives prothétiques participe à la stabilisation prothétique et donc à la prévention des irritations traumatiques des muqueuses. En revanche, l’utilisation d’adhésifs constitue également un facteur étiologique d’apparition d’une candidose sous-prothétique8.

Si des dépôts de tartre sont retrouvés sur la prothèse le praticien peut les enlever à l’aide d’ultrasons suivis d’un polissage soigneux. L’utilisation de vinaigre d’alcool blanc facilite le nettoyage du tartre9.

Après un brossage rigoureux de la prothèse amovible, le sujet peut la garder la nuit. Sinon, elle doit être conservée dans une boîte réservée à cet effet, au sec mais avec une compresse imbibée d’eau et d’antiseptique. La boite doit être nettoyée et la compresse renouvelée régulièrement9.

3. Stratégies fluorées

Des apports adéquat en fluorures permettent5 :

  • De réduire la solubilité de l’émail et lui apportent une plus grande résistance,
  • De reminéraliser les lésions carieuses initiale,
  • De diminuer le développement de la plaque bactérienne.

Le fluor peut être retrouvé dans5:

  • L’eau de boisson : À petites doses (1 mg/L dans l’eau de boisson), le fluor favorise la santé dentaire. La concentration optimale du fluorure dans l’eau de boisson se situe entre 0,2 et 1,2 ppm ;
  • Le sel de cuisine fluoré : Du fait de comorbidité possible imposant un régime alimentaire pauvre en sel l’apport doit être contrôlé et il est préférable de s’orienter vers les autres alternatives ;
  • Le dentifrice fluoré : la grande majorité des dentifrices sur le marché sont fluorés, l’utilisation est simple et classique et efficace contre le développement carieux ;
  • Les bains de bouche fluorés : Un à trois bains de bouche par jour peuvent être réalisés après le brossage des dents ;
  • Les gels fluorés ou les dentifrices hautement fluorés : La teneur en fluor des gels fluorés est au-dessus de 1 500 ppm de fluorure. Une mince couche de gel fluoré doit être déposée dans des gouttières individuelles préparées par le praticien. Cette méthode est réservée aux patients à haut risque ou sous radiothérapie4, ou pour chez les patients âgés/dépendants en cas de modifications alimentaires et d’une hygiène bucco-dentaire souvent moins satisfaisante11 ;
  • Les gommes à mâcher : à raison de 1 à 6 tablettes par jour, contient 0,25 mg de fluorure de sodium par tablette cette alternative est difficile à mettre en place chez les personnes âgées qui sont souvent appareillées ;
  • Les comprimés ou gouttes fluorés : peu adaptées au sujet âgé ;
  • Les vernis fluorés : Les vernis fluorés sont un vecteur intéressant pour cette population car il est difficile, par exemple, de recracher un bain de bouche.

Les agents de reminéralisation sont les bains de bouche fluorés après le brossage des dents, les vernis appliqués tous les 3 mois ou la combinaison de produits : le gel à la maison associé à des applications au cabinet dentaire tous les 4 mois est la méthode la plus efficace.1,11

4. Autres : Prévention des dyschromies extrinsèques

Les colorations extrinsèques sont des colorations acquises générées par des agents externes tels que le café, le thé, le tabac, les médicaments. Le contrôle de ces éléments limite l’apparition des dyschromies.

Ainsi, les principales colorations extrinsèques sont dues22 :

  • aux boissons à base de tanin (café, thé, vin rouge) ;
  • au tabac ;
  • à des bactéries ;
  • aux métaux (le fer, le manganèse, l’argent, le mercure, le cuivre et le nickel) ;
  • à l’utilisation prolongée de cetylpyridinium ou de chlorhexidine.

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