Séquelles graves attribuées à un retard de 24h du traitement d'un syndrome de la queue de cheval

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Séquelles graves attribuées à un retard de 24h du traitement d'un syndrome de la queue de cheval - Cas clinique

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Diagnostic par un médecin généraliste d'un syndrome partiel de la queue de cheval chez un ambulancier de 41 ans. Lettre faite pour une hospitalisation "en urgence", tout en acceptant que celle-ci ne soit réalisée que le lendemain matin. Décision du patient de se faire hospitaliser, non pas comme prévu dans le CHU proche de son domicile mais dans un CHU plus éloigné où il avait l'habitude de conduire ses clients distant de plus de 400km. Décompression chirurgicale pratiquée dans la soirée après une nette aggravation du tableau clinique durant le transfert.

  • Médecin
Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 17/06/2020

Cas clinique

Homme né en 1960, artisan ambulancier.

  • Suivi depuis 3 ans par un médecin généraliste pour des lombalgies apparues 2 ans auparavant, d’abord modérées et bien supportées mais avec, sur un fond douloureux, deux crises lombo-sciatiques gauches traitées médicalement avec succès. Au cours de l’une d’entre elles (il y a 3 ans), un examen tomodensitométrique du rachis lombaire mettait en évidence « une petite hernie discale L4-L5 postéro-médiane, non compressive, sur discopathie dégénérative ainsi qu’une petite hernie discale L5-S1 postéro-médiane, en partie calcifiée ».
  • 3 ans plus tard, le 29 septembre, en début d’après-midi, alors qu’il se trouvait au volant de son ambulance, le patient ressentait une douleur du mollet gauche survenue sans facteur déclenchant qui était calmée par une auto-médication par Profénid®.
  • Le 30 septembre au matin, il ressentait des « problèmes de sensibilité » du pied gauche, centrés plutôt sur le 4ème et le 5ème orteils. Le même jour, des fourmillements se manifestaient au niveau du même pied mais la douleur de la veille avait disparu.
  • Le 1er octobre en se levant, le patient ressentait une sensation d’engourdissement du pied gauche sans autre manifestation. Il téléphonait à son médecin traitant mais ne pouvait le joindre car il était en tournée. Il le rappelait vers 13h et lui expliquait son problème. Le généraliste lui répondait qu’il était surchargé mais lui donnait un rendez-vous pour 16h après s’être assuré qu’il pouvait se déplacer.
  • A l’heure prévue, le patient se présentait au cabinet mais en raison de l’affluence, le généraliste repoussait à 19h la consultation. A cette heure, le médecin recevait le patient qui était accompagné de son épouse (infirmière)  «entre deux clients». Après l’avoir interrogé pour lui faire préciser la séquence des événements, le généraliste examinait le patient et mettait en évidence un trouble sensitif du membre inférieur gauche s’étendant jusqu’à la région anale du même côté qui, d’ailleurs, avait été ressenti par le malade lui-même une demi-heure avant la consultation. Il n’y avait lors de l’examen, pas de troubles urinaires, ni sphinctériens, ni moteurs  Une discussion à trois s’engageait impliquant le médecin, le patient et l’épouse du patient au terme de laquelle « la situation était déclarée urgente ». Le généraliste rédigeait alors une lettre mentionnant : « Je vous adresse en urgence Mr X…, 41 ans qui présente une sciatique de la jambe gauche avec troubles sensitifs +++, au niveau anal notamment. Deux scanners anciens ont mis en évidence des hernies discales chez ce patient ambulancier… ». Puis le médecin demandait  au patient : « Quand veux-tu être hospitalisé ? ». Ce dernier aurait répondu : « Demain matin » ;. Une discussion aurait porté sur le lieu de l’hospitalisation : soit le CHU le plus proche (170 Km), soit un CHU situé au centre de Paris (230 Km) où le malade avait l’habitude de transporter un certain nombre de ses clients. Sans insister, le généraliste remettait la lettre d’hospitalisation au patient, pensant qu’il irait dès le lendemain au CHU parisien. Dans la nuit, vers 5 heures, le patient ressentait un trouble sensitif de la région périnéale étendu aux organes génitaux externes avec une impossibilité d’uriner. Il ne jugeait pas utile de prévenir son médecin traitant et se contentait de prendre un comprimé de Profénid®. Puis il appelait un de ses collègues ambulanciers qui, vers 8h, le prenait en charge pour le conduire à Paris.
  • Au cours du transport, le patient faisait un malaise vagal en raison de violentes douleurs sus-pubiennes dues à un globe vésical, obligeant à un arrêt dans le service d’urgence d’un centre hospitalier situé sur le parcours pour pratiquer un sondage vésical. Arrivé dans le CHU parisien, le patient apprenait que celui-ci n’était pas de « grande garde » et qu’il devait être dirigé vers un CHU situé au nord de Paris. Dès son admission, vers 14h15, il était examiné par le neuro-chirurgien de garde qui portait le diagnostic de syndrome de la queue de cheval et en expliquait la gravité au malade. L’IRM demandée en urgence, révélait : « une hernie discale L4-L5 géante, occupant plus des ¾ du canal rachidien en coupes axiales et sagittales, étendue sur un étage discal L4-L5 et un étage vertébral L5 ».Une intervention de décompression était pratiquée dans la soirée , vers 21 heures. Au décours, lors de la consolidation (mars 2003),  persistaient un déficit partiel des muscles de la loge postérieure de la jambe gauche, un déficit sensitif atteignant plusieurs racines de la queue de cheval du côté gauche (S2 , S5) et S5 du côté droit auxquels étaient associés des troubles sphinctériens vésicaux, anaux et des troubles sexuels. Par ailleurs, existait un état dépressif chronique évoluant par poussées.

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