Les "PREMS" sont aujourd'hui en plein développement. Ces questionnaires demandés aux patients ont pour objectif d'évaluer les parcours et offreurs de soins et le paiement à la performance des professionnels. Tour d'horizon de ces nouveaux indicateurs : quel usage, quel bilan, quel avenir ?
L’opinion des patients compte de plus en plus dans l’évaluation des pratiques professionnelles, des essais cliniques, du service rendu et maintenant des évaluations de santé publique des systèmes de soins et les donneurs d’ordre.
La montée en charge des questionnaires disponibles est impressionnante, avec maintenant plus de 7000 articles déjà parus, un rythme de 1000 parutions par an et des applications officielles qui se multiplient dans tous les pays riches.
Petit rappel : on distingue dans les évaluations demandées aux patients les PROMS et les PREMS.
Un rapport détaillé de l’OCDE vient de paraître sur l’usage des PREMS dans 30 pays depuis 10 an.
Un peu d’histoire : on assiste depuis 2000 à une volonté de standardisation des PREMS ; Le PIcker institute (UK) et l’AHRQ (USA) ont été pionniers des initiatives. 2 organisations internationales ont aussi donné le temps de départ : le commonwealth ‘s funds dès 1998 et l’OMS dès 2000. L’OCDE a commencé à travailler sur le sujet en 2006.
Presque toutes les nations de l’OCDE utilisent des PREMS (à l’exception de la Grèce, Hongrie, Léthonie, Slovénie et Turquie).
En comparaison, très peu de pays ont un organisme dédié ou une organisation dédiée au traitement de ces opinions des patients. Les Pays bas, le Royaume Uni, le Danemark et la Norvège font toutefois office de leaders dans le domaine d’une gouvernance claire et dédiée aux PREMS. Dans la plupart des autres pays, ce sont des institutions déjà existantes qui gèrent les PREMS (en France c’est l’HAS).
La plupart des pays utilisent les PREMS pour comparer les offreurs de soins et communiquer les résultats au public. Certains utilisent déjà PRMS pour le paiement à la performance (P4P) en matière de Qualité de soin (le Canada, la Corée, et la Norvège s’en servent pour le P4P hospitalier ; le Royaume uni et la Suède s’en servent pour le P4P en soins primaires.
Le Royaume Uni (RU) a notamment développé en 2009 un cadre complet de P4P (Commissioning for Quality and Innovation payment framework, CQUIN) qui intègre depuis 2011 des PREMS basés sur 5 questions posées aux patients: 1) avez-vous été associé aux décisions vous concernant, 2) avez-vous trouvé des professionnels à l’hôpital à qui confier vos problèmes de soins, 3) avez-vous bénéficié de suffisamment de confidentialité, 4) est-ce qu’on vous a parlé des effets indésirables des médicaments qu’on vous a donnés, 5) avez-vous été recontacté par le staff après votre sortie de l’hôpital.
Si les méthodes de recueils sont à peu près standardisées, les aspects cognitifs de l’interprétation des résultats (le sens à donner) ne sont –hélas- pas aussi détaillés dans les pays utilisant les PREMS. Norvège et Hollande sont leaders sur le sujet.
La restitution des résultats et leur réutilisation pour un objectif précis, nécessitent encore du travail dans tous les pays. Les états sont encore prudents sur l’utilisation par exemple dans le cadre des certifications/ accréditations.
En l’état, il subsiste un risque important de voir ces indicateurs péricliter car ils coûtent de l’argent et ne sont pas (suffisamment) utilisés dans les mécanismes généraux de surveillance de la santé. Ceci réclame tout autant une bonne maîtrise technique des outils, qu’un engagement politique (voir les articles de Coulter notamment sur le RU).
Le bon usage des PREMS repose sur 7 principes (HCQI 2010 ‘Improving Value in Health Care: Measuring Quality’).
La France, à travers l’HAS s’est résolument inscrite dans ce mouvement mondial et développe des PREMS qui sont ou seront bientôt incluses dans les évaluations aussi bien en soins primaires qu’à l’hôpital.
Pour aller plus loin :
Klazinga, N. S., & Fujisawa, R. (2017). Measuring patient experiences (PREMS): Progress made by the OECD and its member countries between 2006 and 2016. OECD Health Working Papers, (102), 0_1-59.
Bonjour,
Je vous remercie pour l'article concernant les PROMs et PREMs. En tant que CPTS, il nous est demandé, désormais de rajouter l'évaluation de la satisfaction patient (client?!) dans les protocoles à établir ou mettre à jour.
Les conséquences sur une éventuelle obligation de résultat en terme de satisfaction du ''ressenti client'' (un patient n'est pas un sachant, comment le considérer systématiquement comme un pair?).
Il s'agit d'une possible dérive terrifiante d'autant qu'à la lecture de votre article, il n'y a pas (en France, du moins) de comité d'éthique ou de groupe d'experts médicaux ou du moins de réflexion collégiale pour l'établissement d'un référentiel cadré, unique et d'accord parties, n'est ce pas?
L'emprise de la HAS sur la pratique libérale me questionne. Bureaucratie dans un contexte d'attrition des moyens de soins vaut persécution...