L’institut et la fondation pour une culture de sécurité (ICSI-FONCSI) nous propose un remarquable travail pédagogique sur la notion de culture de sécurité, si souvent citée en santé, mais dans des termes qui confinent plus souvent à des intentions louables qu’à des actes précis.
L’approche en termes de culture de sécurité́ a pour origine des évènements majeurs (dans le nucléaire notamment) qu’on ne pouvait plus expliquer seulement en termes de comportements individuels, et qui nécessitaient donc une compréhension de la contribution de l’organisation.
La culture de sécurité est un ensemble de manières de faire et de manières de penser largement partagées par les acteurs d’une organisation à propos de la maîtrise des risques les plus importants liés à ses activités.
La culture de sécurité reflète l’influence que la culture organisationnelle exerce sur les manières de faire et les manières de penser qui affectent la sécurité.
Les ouvrages de sécurité́ font souvent référence à la pyramide de Bird, qui exprime une relation de proportionnalité́ entre les évènements graves et mineurs. Bird dit que pour un accident grave, on dénote 600 incidents mineurs). Cette relation entre incidents mineurs et accidents de l’autre a motivé une politique volontariste qui se focalise sur les incidents mineurs pour garantir un haut niveau de sécurité́. Or, cette relation incident-accident ne s’avère vérifiée que si les accidents bénins et les accidents graves ont la même cause, ce qui est plutôt rare.
Une approche en termes de culture de sécurité́ doit donc viser en priorité́ les risques les plus graves, ceux qui menacent le plus la survie de l’organisation. Cette approche a plus de chance d’être consensuelle, d’entraîner l’ensemble des acteurs, et elle peut avoir un effet sur les risques moins graves – le contraire n’étant pas vrai.
La conscience partagée des risques les plus importants constitue le socle de la culture de sécurité́ d’une entreprise. Ils peuvent être différents suivant les activités, les sites, les métiers mais ils doivent être connus et partagés par tous les acteurs de l’organisation.
La réflexion sur les risques les plus importants intègre ceux qui menacent les salariés internes, les prestataires, les clients/patients, les riverains, l’environnement, les installations, la continuité́ des opérations.
L’amélioration de la performance en sécurité́ passe par une action cohérente sur les dimensions techniques, le management de la sécurité́, les facteurs humains et organisationnels. Ces différents « piliers » sont en lien avec la culture de sécurité́.
On appelle sécurité réglée, la sécurité résultant des lois, règlements et interdictions. Cette sécurité réglée est construite sur la base de la réduction/suppression de toutes les situations identifiées comme à risques.
La sécurité gérée repose sur l’intelligence adaptative des opérateurs humains, qui permet de traiter les surprises et les aléas des situations quotidiennes de travail.
La sécurité réglée a pris le pas progressivement sur la sécurité gérée, mais on a toujours besoin de l’adaptabilité et de l’intelligence des opérateurs humains.
Le réglage entre les deux sécurités reste un objet sensible. Trop de sécurité réglée tue l’adaptation aux situations non standards, mais trop de sécurité gérée introduit une prime à l’improvisation avec tous les risques que cela comporte
Chaque organisation doit s’efforcer de régler la balance entre chaque sécurité, et être exemplaire en matière de sécurité́ dans son propre monde de contraintes. Il n’y a pas de modèle unique.
Pour la plupart des entreprises avancées dans le domaine de la sécurité́, l’enjeu est d’évoluer vers une culture qui fasse mieux collaborer le management et les acteurs de terrain sur les questions liées à la sécurité́.
On attend plusieurs qualités de ce management :
Ces différentes dimensions sont à̀ décliner de manière appropriée à tous les niveaux du management.
On ne peut pas « acheter » une culture de sécurité́ en appliquant un référentiel extérieur construit dans un contexte diffèrent. C’est la mobilisation conjointe de tous les acteurs, à partir d’une vision partagée des forces et faiblesses de l’existant, qui permet de faire évoluer progressivement la culture de sécurité́.
Le diagnostic de la culture de sécurité́ actuelle est un point de départ indispensable à toute démarche qui souhaiterait la faire évoluer. Il porte à la fois sur les pratiques des différentes catégories d’acteurs et sur leurs perceptions de la gestion de la sécurité. Plus ce diagnostic est partagé par toutes les parties prenantes, plus les chances de les mobiliser par la suite sont enlevées.
Les méthodes de description de la culture de sécurité́ actuelle doivent être adaptées à chaque situation. Leur pertinence dépend de leur capacité́ à renvoyer à l’ensemble des parties prenantes une description des forces et des faiblesses de l’organisation en matière de sécurité́.
Le diagnostic ne constitue pas un objectif en soi. Il vaut mieux ne pas enclencher ce type de démarche si l’organisation n’est pas mûre pour affronter collectivement, et traiter, les problèmes (souvent profonds !) que révèle le diagnostic.
L’action sur la culture de sécurité vise à̀ transformer des dimensions de l’organisation qui ont donné naissance à̀ des perceptions et des comportements non souhaitables en matière de sécurité, tout en soutenant le développement des atouts existants.
La culture de sécurité implique des manières de faire et des manières de penser partagées :
On ne peut changer durablement les comportements en sécurité sans faire évoluer le regard qui est porté par tous les acteurs sur la sécurité et son importance.
On ne peut pas changer les manières de penser sans faire évoluer les signes concrets qui sont donnés par la ligne hiérarchique à travers les décisions techniques (qualité́ des situations de travail) et organisationnelles, en particulier par les postures managériales (écoute, reconnaissance/sanction).
La culture de sécurité est construite par les interactions entre les acteurs, dans le cadre d’une organisation qui doit à la fois s’adapter à son environnement et assurer l’intégration de ses membres. Les familles d’acteurs qui influencent le plus la culture de sécurité sont les managers, les salariés et leurs représentants, les collectifs de métiers.
Toute entité organisationnelle a une « culture de sécurité »,au sens où les acteurs partagent certaines manières de faire et de penser qui ont des conséquences sur la sécurité. L’existence d’une culture de sécurité n’implique pas que celle-ci joue un rôle suffisant pour la prévention des risques.
La culture de sécurité reflète la place que la culture organisationnelle donne à la sécurité dans toutes les décisions, tous les services, tous les métiers, et à tous les niveaux hiérarchiques.
Parce qu’elle touche les dimensions de fond de l’organisation, l'action en matière de culture de sécurité a des effets bénéfiques sur la sécurité et la performance globale de l’entreprise.
Pour télécharger le document :
Bernard D., Boissières Y., Daniellou F., Villena J. La culture de sécurité, comprendre pour agir, les cahiers de l’ICSI 2017-01, 2017
http://www.icsi-eu.org/documents/88/csi_2017-01_culture-securite_hd.pdf
A noter : le travail est téléchargeable, en trois langues (Fr, En, Es), et ne vise pas spécialement la santé mais reste totalement applicable à ce domaine.
Le renforcement d’une culture de sécurité au travail vise à développer une perception du risque partagée par tous les membres de l’entreprise, avec comme résultat un ensemble de comportements et de pratiques sécuritaires réduisant significativement la fréquence et la gravité des accidents.
Il y a nécessité d’une meilleure prise en compte des aspects comportementaux dans une démarche globale de prévention : cela vise à créer une culture de sécurité au travail affermie, en développant la sensibilisation des employés aux risques, leur responsabilisation et leur implication : http://www.officiel-prevention.com/formation/formation-continue-a-la-securite/detail_dossier_CHSCT.php?rub=89&ssrub=139&dossid=555