La résistance des bactéries aux antibiotiques est devenue ces dernières années une question majeure de santé publique mondiale. Ce phénomène existe en médecine humaine tout comme en médecine vétérinaire, c'est pourquoi il faut également préserver les antibiotiques utilisés en thérapeutique animale.
La résistance des bactéries aux antibiotiques est un phénomène aussi ancien que celui tout aussi naturel de l’antibiose. Cependant, le phénomène a explosé avec l’utilisation rapidement massive des antibiotiques peu après leur découverte qui, elle, est relativement récente. Cela s’est produit dans toute la seconde moitié du XXème siècle. Aujourd’hui, ce phénomène de résistance bactérienne est devenu une question majeure de santé publique mondiale.
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), les agences et ministères en charge de la santé dans le monde entier, le G20, l’Union Européenne et tant d’autres institutions et organismes ont pris conscience du problème et réagissent. Ils coopèrent dans cette lutte. Pour certains pays, il s’agit d’une grande cause nationale. Pour l’OIE, les antibiotiques constituent aujourd’hui un Bien public mondial.
Dans les pays ou régions du monde où la prise de conscience est aujourd’hui la plus avancée, on investit autant qu’on le peut en matière de recherche, de surveillance et de compréhension du phénomène, de formation des professionnels, d’éducation des citoyens, de réglementation aussi. Ces mêmes pays agissent au plan international pour entraîner ceux, encore très nombreux, qui sont en retard.
Les professionnels de santé humaine et animale se remettent en cause et modifient leurs pratiques pour préserver les antibiotiques et conserver ainsi la capacité à prévenir et guérir les maladies infectieuses bactériennes.
Les phénomènes de résistance bactérienne existent en médecine vétérinaire et compromettent la santé des animaux et leur bien-être. Or le bien-être animal est devenu une préoccupation majeure des citoyens dans les sociétés occidentales.
S’agissant des animaux de production, fournisseurs de protéines d’origine animale pour l’alimentation humaine, la résistance bactérienne, en menaçant la santé des animaux, menace la sécurité alimentaire de l’homme à l’échelle planétaire. Même si la consommation de produits d’origine animale baisse en ce moment en Europe, elle augmente partout ailleurs et les prévisions mondiales à l’horizon 2050 sont de l’ordre d’une augmentation de 50 % par rapport à aujourd’hui. La nécessité de préserver la santé animale implique la préservation du capital que constituent les antibiotiques, même si toutes les alternatives possibles à leur utilisation doivent être, autant que faire se peut, privilégiées.
Un tel objectif de santé animale se confond en fait avec celui de santé publique ; une utilisation prudente et raisonnée des antibiotiques en médecine vétérinaire est favorable à la maîtrise de l’antibiorésistance en médecine humaine.
Le risque de passage de la résistance entre l’animal et l’homme est à l’origine des politiques publiques de réduction de l’usage des antibiotiques en médecine vétérinaire. Il y a quelques exemples documentés de transmission dans le sens animal-homme mais aussi de transmission en sens inverse. Leur portée épidémiologique semble rester actuellement faible, les passerelles paraissant plutôt limitées. Toutefois, cela n’enlève rien à la nécessité de réduire de façon drastique dès maintenant les utilisations, tant en médecine humaine qu’en médecine vétérinaire, pour éviter de part et d’autre l’enrichissement des réservoirs en bactéries résistantes ou a fortiori multi-résistantes et les risques de passage accru d’une espèce à l’autre.
En réalité, le vétérinaire, agent majeur de la santé publique, ne saurait dissocier les deux objectifs. Sa réflexion éthique, le respect de sa déontologie, très directive dans ce domaine, le conduisent à privilégier les questions de santé publique et à s’engager sans réserve dans de meilleures pratiques en matière d’utilisation responsable, c’est-à-dire prudente et raisonnée, des antibiotiques.
Le bon vétérinaire se considère naturellement comme un acteur engagé à la fois dans le bien-être animal et la santé publique. Dans la lutte contre l’antibiorésistance, il fait partie de la solution globale. Ce faisant, sur ce registre de la maîtrise de la résistance bactérienne aux anti-infectieux, il acquiert progressivement du même coup une culture de la démarche qualité-sécurité dans sa pratique quotidienne.
Sa formation initiale a pris en compte ces données nouvelles mais c’est par une formation continue dont l’offre est aujourd’hui considérable sur ce seul registre des bonnes pratiques d’antibiothérapie qu’il doit tendre en permanence à des pratiques d’excellence.