Watcher R., Howell M. Resolving the Productivity Paradox of Health Information Technology JAMA. 2018;320(1):25-26. doi:10.1001/jama.2018.5605
Depuis 10 ans, le ministère américain de la santé a choisi de pousser massivement les technologies digitales en santé. En 2008, moins d’un hôpital sur 10 était équipé de dossiers électroniques de patients, aujourd’hui moins d’un hôpital sur 10 reste non équipé. La montée du digital s’applique à quasiment tous les domaines en santé avec le sentiment que le bénéfice est réel pour la qualité et la sécurité. Toutefois, les médecins, déjà surchargés, sont souvent au bord du burn-out par l’obligation croissante de saisies de données sur ces nouveaux systèmes très peu ergonomiques, sans parler d’une gestion de temps supplémentaire au détriment de la communication entre le patient et le médecin pendant la consultation. Pire, et c’est un paradoxe, aucune étude n’a pu démontrer jusqu’à présent une augmentation de l’efficacité et de productivité associée à l’informatisation du cabinet médical.
La bonne nouvelle est que ce paradoxe est connu dans les autres industries et normalement se résorbe au bout de quelques années ; ce pourrait être le cas en santé si l’on combine bien toutes les nouveautés technologiques : connectivité massive inter-systèmes, intelligence artificielle, apprentissage automatique des machines, applications vraiment contextualisées à la médecine, etc. Mais pour en arriver là, il faudra sans doute aussi changer plusieurs fondements du système de santé, quitter une logique de dossiers papiers, quitter une formation médicale basée sur l’étude de cas cliniques particuliers, quitter une rémunération à l’acte, et passer à une vision système à haute fiabilité et qualité, où, les prises en charge deviennent collectives, les données partagées et analysées ensembles pour le bénéfice de chaque patient (big data), les cliniciens et les systèmes rendus plus responsables dans leur organisation mutuelle, et les honoraires partagés aussi.
On est loin encore de ce résultat. Mais la mutation du système est en marche et même inéluctable sur le court terme compte tenu de l’arrivée rapide, massive et des potentialités gigantesques des nouvelles technologies informatiques (les nouvelles mémoires exprimées en Zettabytes -100,000 mega bytes- vont changer totalement nos capacités à cumuler les données médicales des cohortes du monde entier, et en extraire les données médicales– big data).