Une vache allaitante de 4 ans présente de la diarrhée avec amaigrissement depuis quelques semaines. L'absence de diagnostic causal, couplée à la mort de l'animal, conduit à une rupture de confiance entre l'éleveur et son vétérinaire.
En mai 2010, dans un tout petit élevage de bovins allaitants charolais, sans introduction d’animaux depuis 2004, où les animaux – de qualité - sont inscrits au livre généalogique de la race, une vache de quatre ans, dans un pré avec son veau ainsi qu’avec une dizaine d’autres vaches également suitées, présente, seule, de la diarrhée avec amaigrissement depuis quelques jours selon l’éleveur, depuis quelques semaines en réalité.
Cette vache était remarquablement en l’état à l’automne précédent (elle pesait une tonne environ) et était encore en bon état à la mise au pré en début de printemps.
Les animaux avaient bénéficié de traitements anthelminthiques systématiques à la rentrée à l’étable l’hiver précédent et peu après la mise au pré en mars. Cette vache en particulier avait reçu deux nouveaux traitements anthelminthiques décidés par l’éleveur, hors de toute prescription.
Le 9 mai l’éleveur prélève lui-même des fèces et passe sans rendez-vous consulter ses vétérinaires au cabinet ; il leur confie le prélèvement en vue d’un examen de laboratoire pour recherche de parasites (œufs d’helminthes) et demande un traitement symptomatique d’attente.
Le vétérinaire de l’équipe rencontré convainc son client éleveur de la nécessité d’une démarche diagnostique plus élaborée et donc de la nécessité pour lui d’aller examiner l’animal sur place.
Il se rend dans l’élevage quelques jours plus tard, soit le 14 mai. Les résultats de l’examen coproscopique, alors connus, ne permettaient pas de conclure à une origine parasitaire de la diarrhée. Le praticien constate l’existence d’une diarrhée sous forme d’émissions violentes et douloureuses.
Il établit, compte tenu de l’évolution clinique, compte tenu des traitements anthelminthiques stratégiques (prophylactiques) antérieurement réalisés et du résultat de l’examen parasitologique, un pronostic d’ores-et-déjà très sombre.
Parmi les nombreuses hypothèses étiologiques passées en revue et, pour la plupart, éliminées dans le contexte (seul animal malade au sein d’un groupe, absence d’antécédents infectieux dans l’élevage, vaccinations effectuées, examen de l’environnement pour recherche de causes toxiques sans résultat), il privilégie néanmoins celle de l’entérite paratuberculeuse (mycobactériose, maladie de Johne) et réalise un prélèvement rectal pour bactériologie ainsi qu’un prélèvement sanguin pour sérologie.
Les deux examens, dont les résultats sont reçus le 25 mai, se révèlent négatifs. Un traitement de type symptomatique est proposé sur insistance de l’éleveur et la situation clinique se dégrade dans les 48 heures, conduisant à l’euthanasie de la vache.
Une crise relationnelle s’installe dans le même temps entre l’éleveur et son vétérinaire.
Une autopsie met en évidence un aspect encéphaloïde de l’intestin grêle habituellement décrit dans la maladie de Johne mais une recherche PCR à partir du ganglion mésentérique revient négative quelques jours plus tard pour cette mycobactériose.
L’hypothèse causale d’entérite paratuberculeuse, sans pouvoir être catégoriquement exclue, est devenue beaucoup moins probable, sans que la cause de cette entérite n’ait pu être établie pour autant.
Cette difficulté rencontrée dans la démarche diagnostique, jointe à la croyance erronée de l’éleveur en une cause parasitaire - pourtant scientifiquement exclue, notamment par l’autopsie -, et à l’espoir longtemps inaltéré du praticien dans une confirmation paraclinique du diagnostic d’entérite mycobactérienne (maladie de Johne), a gravement et définitivement altéré la relation entre l’éleveur et son vétérinaire.
Le suivi sanitaire permanent de l’élevage - qui comprend la dispensation régulière de soins, d’actes de médecine ou de chirurgie, la réalisation d’un bilan sanitaire d’élevage, l’établissement et la mise en œuvre d’un protocole de soins et la réalisation de visites régulières de suivi - doit être idéalement conduit de façon exclusive par un vétérinaire ou un groupe de vétérinaires préférentiellement choisi sur la base de la confiance.
Ce suivi sanitaire permanent de l’élevage est pratiqué de façon optimale dans le cadre d’une médecine vétérinaire partenariale. La démarche du diagnostic doit toujours être commentée, expliquée et discutée dans le cadre d’un consentement éclairé.
Ce suivi permanent est indissociable d’une médecine vétérinaire fondée sur les faits et la science.
La mise en place d’un tel contrat doit être refusée ou résiliée par le vétérinaire quand l’éleveur ne se montre ni confiant à son égard ni respectueux des règles du code de la santé publique.
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