Rapport d’orientation de la HAS, Dépistage du cancer de la prostate, analyse critique des articles issus des études ERSPC et PLCO publiées en mars 2009, Juin 2010
L’incidence du cancer de la prostate a connu une forte augmentation depuis 1980, en raison de l’effet combiné du vieillissement de la population, de l’amélioration des moyens diagnostiques et de la diffusion du dépistage individuel par dosage du PSA (+6,3% par anentre 1980 et 2005 et +8,5% par an entre 2000 et 2005). La mortalité par cancer de la prostate a quant à elle diminué depuis 1990, cette diminution étant plus importante sur la période 2000-2005 (–2,5% par an). Cette réduction faible mais constante de la mortalité peut être mise en rapport avec l’amélioration des conditions de prise en charge (amélioration de l’efficacité des traitements et diagnostic à un stade plus précoce).
Si le dosage du PSA a ouvert la voie à un possible dépistage du cancer de la prostate, aucun programme de dépistage systématique n’a été mis en place en France comme partout ailleurs dans le monde. En effet, d’importantes questions restent aujourd’hui posées, en particulier concernant l’impact du dépistage en termes de réduction de la mortalité pour la population concernée, mais aussi les risques de surdiagnostic et de surtraitement notamment dans le cas des cancers diagnostiqués à un stade très précoce et peu agressifs chez les sujets âgés.
Deux études référentes ont été publiées dans le NEJM sur les PSA, une très défavorable Américaine, et l’autre plus favorable Européenne.
L’étude américaine (Andriole GL, Crawford ED, Grubb RLI, Buys SS, Chia D, Church TR, et al. Mortality results from a randomized prostate-cancer screening trial. N Engl J Med 2009;360(13):1310-9), de puissance plus réduite que l’étude européenne (Schröder FH, Hugosson J, Roobol MJ, Tammela TL, Ciatto S, Nelen V, et al. Screening and prostatecancer mortality in a randomized European study. N Engl J Med 2009;360(13):1320-8), correspond à une analyse clairement en intention de dépister, évaluant l’efficacité en condition réelle d’une proposition d’un dépistage lourd (trois cancers ciblés), fréquemment répété mais mené dans des conditions aussi proches que possible des conditions de suivi disponibles dans le système de santé ; la sélection d’une population particulière et les conditions d’application des tests ne sont probablement pas facilement extrapolables au contexte français. Les résultats sont néanmoins informatifs, documentant une acceptabilité très faible, un sur-diagnostic important, des effets indésirables fréquents et suggérant l’absence d’effet sur la mortalité spécifique. 2) L’étude européenne est caractérisée par une grande liberté laissée aux pays, résultant en une hétérogénéité des pratiques de dépistage et de conduite de l’étude elle-même ; l’analyse principale présentée n’est pas, quoi qu’en disent les auteurs, une analyse en intention de dépister. Les résultats sont cependant informatifs, documentant un sur-diagnostic important et des effets indésirables fréquents. Les résultats d’efficacité, repris en intention de dépister, ne sont pas concluants ; limitées au core group, les données sont au mieux non convaincantes.
Les deux études apportent des arguments pour dire qu’un dépistage a de nombreux inconvénients: fréquence des faux positifs, entrainant un sur-diagnostic majeur qui accentue le caractère indésirable des complications de la démarche diagnostique.
La HAS ne recommande pas l’usage des PSA en détection systèmatique du cancer de la prostate.
Confirmation du grand risque de sur diagnostic de cancer de la prostate particulièrement chez les personnes âgées avec un préjudice important. Malgré ce, les pratiques des médecins généralistes restent les mêmes : sur médicalisation et prescription de PSA en screening systématique.