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Briefing, huddles et check-lists

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2024 - Peut-on (mieux) standardiser les briefings-débriefings à partager dans les services ?

14/02/2025

Phillips EC, Tallentire V, Routine versus prompted clinical debriefing : aligning aims, mechanisms and implementation BMJ Quality & Safety Published.

Résumé

L’idée de partager la situation courante du Service par des briefings et échanges (multilatéraux, la parole à tous) entre professionnels (médecins, infirmiers, autres métiers concernés), sur la situation de travail en cours, pour échanger sur les cas problématiques, l’actualité des choses à faire, les nouvelles priorités qui s’imposent, les contraintes de chacun, est maintenant considérée comme une bonne pratique reconnue par toutes les instances.

Ces activités servent tout à la fois à la construction de l’équipe, la sécurité du patient, et à l’efficacité globale du service. 

Pour autant, leur pratique reste difficile, comme en témoigne les nombreuses revues de synthèse déjà publiées, faute de temps, et faute aussi de conviction de pas mal de professionnels -surtout des médecins- qui se disent gênés par ces moments imposés répétés, septiques sur le contenu à échanger ; bref, qui considèrent que cette pratique qui suppose l’écoute répétée de chacun, même brève, est surtout demandée d’abord (à leurs yeux) par les infirmiers qui veulent partager l’information et parler de leurs besoins spécifiques, mais fait souvent perdre du temps au médecin (qui doit écouter poliment des choses qu’ils savent déjà, ou des problèmes qui ne les concernent pas, en les empêchant de faire leur travail). Dans ce type d’attitude, très souvent rapportée dans la littérature, on s’accordera facilement à reconnaître que les préjugés catégoriels et les faits culturels dépassent toute rationalité de l’analyse.

Une série d’articles et d’éditoriaux récents publiés dans le BMJ Quality and Safety (Paxino, 2023, Phillips, 2023, 2024) appellent à plus de standardisation dans les pratiques pour gagner de l’acceptabilité, non pas in fine pour imposer une seule et même seule logique pour tous les briefings possibles, mais plutôt pour encadrer les différences justifiées par les contextes différents, les accompagner et en éviter les plus mauvais côtés. 

Ces articles reprennent les résultats de 46 autres études précédentes parlant du "avec qui, quand, quoi, où, et pourquoi" les briefings doivent être faits.

Le "pourquoi" et le "quand" sont particulièrement différenciateurs des types de briefings rencontrés. Les auteurs en déduisent une nouvelle terminologie qui distingue les briefings suggérés/motivés contextuellement (qui se subdivisent eux-mêmes entre immédiats versus différés) des briefings de routine (à la fin d’une intervention ou d’une vacation, particulièrement dans le cadre des transmissions). 

Ils suggèrent de sortir de l’idée d’une façon unique de faire un briefing-débriefing. Ils voudraient proposer un cadre d’orientation à la fois mieux standardisé et mieux contextualisé aux différentes situations. L’idée est d’éviter par exemple les défauts de certaines pratiques à chaud, juste après un événement, avec des personnels encore stressés, ou au contraire de pratiques si différées dans le temps qu’elles n’ont plus d’utilité de recalage de l’activité.

De façon générale, les auteurs reconsidèrent aussi la notion de routine, en imaginant que les briefing-débriefings devraient être systématiques après un événement particulier, mais avec une approche plus proactive (cherchant tout de suite les leçons à retenir) que réactive (rechercher les causes de l’événement et pire chercher des coupables tout de suite). 

L’objectif central est de tirer les leçons sur ce qui n’a pas marché pour l’équipe, en échangeant sur ce que l’on pourrait faire autrement ici et maintenant. Cette approche n’est pas contradictoire avec un second temps différé pour revenir sur l’événement à froid avec une analyse sur le fond. La même idée de briefing proactif court prend sûrement encore plus de sens si l’on ne la réserve pas à aux seuls événements graves, mais qu’on instaure la pratique des briefings collectifs courts pour des événements moins graves, moins porteurs d’émotion, mais ouvrant tout autant la possibilité de tirer en groupe les leçons et améliorer les pratiques de sécurité de l’équipe.

Quels sont les obstacles qui restent à une pratique régulière ?

Plusieurs peuvent être évoqués, mais les freins culturels déjà cités les dominent tous : freins égo centrés et catégoriels quant aux bénéfices attendus d’une mesure à prendre, pouvoir de celui qui sait par rapport à ceux avec qui on doit partager, obligation d’écoute vécu comme une critique potentielle de ses actes, etc. 

On sait déjà que ces changements de ces résistances seront toujours lents, mesurés en mois plutôt qu’en jours, quelle que soit les incitations utilisées. Mais à ne pas s’y mettre et commencer, rien ne changera du tout…

Mon avis

Un très bon article de fond sur la pratique des briefings, et les méthodes à préconiser.