Une jeune patiente consulte un médecin généraliste pour douleurs abdominales accompagnées de vomissements. Le diagnostic retenu est celui de « gastroentérite ». Elle décède à son domicile 8 jours plus tard. Condamnation du généraliste pour homicide involontaire.
Plainte pénale pour homicide involontaire déposée par la mère de la victime (juillet 2010).
Ce matériel est réservé à un usage privé ou d’enseignement. Il reste la propriété de la Prévention Médicale, et ne peut en aucun cas faire l’objet d’une transaction commerciale.
Expertises (mars 2009 –novembre 2011- juin 2012)
Le juge d’instruction désignait successivement trois experts : un professeur de médecine légale, puis un médecin des hôpitaux et enfin un chirurgien des hôpitaux qui rendaient leur avis, sur pièces.
Un consensus se dégageait sur les points suivants :
« (…) - le décès était probablement dû à un choc septique, dont l’installation avait été rapide et brutale, et qui était en rapport avec la péritonite ;
- le diagnostic de gastro-entérite aiguë retenu lors de la consultation du 11 mai apparaissait compatible avec la symptomatologie dont se plaignait la patiente et l’examen pratiqué, conforme aux règles de l’art, en dehors de la non-prise de la température ;
- l’absence de dossier médical significatif ne permettait pas, toutefois, de vérifier les affirmations, a posteriori, du médecin généraliste ;
- la persistance d’une symptomatologie digestive le 18 mai (soit plus de 48-72 h après le diagnostic de gastro-entérite aiguë) aurait dû amener le généraliste à s’interroger et à remettre en question son diagnostic initial ;
- une hospitalisation urgente prescrite lors de la visite du 18 mai aurait permis de réaliser les examens complémentaires nécessaires (et notamment une échographie pour mettre en évidence l’épanchement intra-péritonéal) et, ainsi, décider d’une intervention chirurgicale qui, avec une réanimation et une antibiothérapie adaptées, aurait, vraisemblablement, permis la survie de la patiente. En effet, la mortalité d’une péritonite aiguë généralisée d’origine appendiculaire chez un adulte jeune oscille entre 1 et 5 %.
- la prescription d’un antibiotique (Bactrim Forte®) dans le traitement d’une gastro-entérite aiguë n’est pas conforme aux données acquises de la science (…) »
Au total, les trois experts affirmaient que le médecin généraliste avait commis une négligence dans la prise en charge de la patiente, lors de sa visite du 18 mai.
Ordonnance de Renvoi devant le Tribunal correctionnel (juge d’instruction - avril 2013)
« (…)Il est constant qu’une erreur de diagnostic ne saurait être constitutive d’une faute au sens de l’article 221-6 du Code pénal, dans la mesure où le médecin pratique un examen complet et soigneux de son patient. L’erreur de diagnostic ne devient donc punissable que dans le cas d’une négligence caractérisée, c'est-à-dire en l’absence de diligences normales dans l’examen du patient et dans sa prise en charge.
En l’espèce, si les experts sont convenus que l’erreur de diagnostic commise le 11 mai 2010 pouvait être commise dans les circonstances dans lesquelles le médecin généraliste avait examiné sa patiente, la persistance de cette erreur le 18 mai 2010, se traduisant dans une prise en charge inappropriée (notamment par l’absence de prescription d’examens complémentaires biologiques et d’imagerie médicale), est constitutive d’une faute caractérisée au sens de l’article 121-3 du Code pénal. Enfin, ce manquement a concouru au décès de la patiente dont les chances de survie auraient été réelles si sa prise en charge avait été adaptée.
En conséquence, le médecin généraliste sera renvoyé devant le tribunal correctionnel pour y répondre de ces faits (…) »
Jugement du Tribunal correctionnel (novembre 2013)
« (…) Attendu qu’il résulte des éléments du dossier que les faits reprochés au médecin généraliste sont établis, il convient de l’en déclarer coupable et d’entrer en voie de condamnation (…) »
Condamnation du médecin généraliste à un emprisonnement de 1 an avec sursis
et à 72 000€ de dommages et intérêts au titre du préjudice d’affection, pour les parents et le frère de la patiente.