Un homme de 38 ans, opéré 18 ans avant d’une splénectomie après accident de la route, fait soudainement un épisode infectieux qui s’avèrera être un purpura fulminans. Le corps médical va passer totalement au travers des premiers symptômes sans doute par absence de mise en rapport de cet épisode infectieux avec les antécédents de splénectomie.
Homme né en 1965. Splénectomie pour rupture de rate (accident de la circulation) à 18 ans. Aucune consigne de suivi médical donnée à la sortie du service de chirurgie, ni par les différents médecins généralistes ou médecins du sport (pratique de nombreuses activités dont VTT en compétition) qu’il sera amené à rencontrer.
Le 11octobre 2003 à 4 heures du matin, le patient était réveillé par une sensation de froid. Il ne se sentait pas bien, grelottait, frissonnait, avait l’impression d’être fébrile mais ne prenait pas sa température. Appel d’un médecin urgentiste qui constatait une PA élevée (chiffre?), concluait à un « stress » d’après les dires du patient et ne faisait aucune prescription. A 8 heures, il se rendait au cabinet d’un médecin généraliste, dans un véhicule conduit par son épouse car il était « plié en deux » par des douleurs abdominales et ressentait beaucoup de nausées. Le médecin –qui était consulté pour la première fois par le patient- notait dans son dossier : « Antécédent de splénectomie ;fièvre supérieure à 38°C ;nausées et douleurs abdominales ; absence de raideur de la nuque ; PA à 120/ 70. ». Il diagnostiquait une gastro-entérite aiguë et prescrivait paracetamol , ibuproféne et Motilium®. A noter que le médecin raccompagnait le patient jusqu’à son véhicule et qu’en raison de l’intensité des douleurs abdominales dont il se plaignait, un gendarme présent sur place, devait l’aider à s’y installer.
Dans l’après-midi, survenait une accalmie permettant au patient de se reposer et de s’alimenter légèrement. Mais en fin de soirée, se produisait une aggravation brutale, justifiant un appel d’urgence aux pompiers qui conduisaient le patient aux urgences du CHU.
A l’admission, de nuit, la PA était à 60/ 40 mmHg et il était noté l’apparition d’un purpura nécrotique des extrémités et du visage. La température était à 35° 4 C et la saturation en oxygène à 60 % à l’air ambiant. Une première hémoculture était réalisée à 23 h 50, juste avant que soit initiée une antibiothérapie par Rocéphine® et Gentalline® suivie du transfert en réanimation. Dans ce service, outre l’état de choc sévère, étaient mis en évidence un œdème pulmonaire lésionnel, une insuffisance rénale majeure et un syndrome biologique de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD). Le malade conscient était intubé et mis sous respirateur. Un traitement par amines pressives était institué tandis que l’antibiothérapie initiale était poursuivie pendant 4 jours, relayée par la Rocéphine® seule pendant 10 jours. Aucun agent infectieux n’était mis en évidence. Les hémocultures étaient stériles. La recherche d’antigène soluble du méningocoque dans les urines était négative à 2 reprises. Il n’était pas réalisé de recherche d’antigène soluble du pneumocoque. Une vaccination antipneumococcique était pratiquée. L’évolution de cette défaillance multiviscérale était finalement favorable, mais après la survenue d’une hémorragie méningée attribuée à la CIVD et surtout de nécroses cutanées du nez et des extrémités des membres supérieurs et inférieurs, nécessitant de multiples interventions itératives d’excision-greffe. Le patient était transféré en rééducation le 9 décembre. Il regagnait son domicile le 23 mars 2004. Mais il subissait de nouvelles interventions en mai, septembre et décembre 2004 ainsi qu’en avril, novembre 2005 et juin 2006. Au décours, persistaient d’importantes séquelles se traduisant par une atteinte majeure de la fonction de locomotion due notamment à une amputation des deux avant-pieds et qui nécessitaient le port permanent de chaussures à semelle rigide, la marche étant impossible sans cet appareillage.