Un technicien de laboratoire de nuit doit faire face à deux commandes simultanées de délivrance de Produits Sanguins Labiles (PSL), dans le cadre d’urgences vitales...
Etablissement de Santé de 380 lits, recevant les activités habituelles de MCO (Médecine – Chirurgie – Obstétrique), avec un service d’Urgences de 50 000 passages / an et un service de réanimation-unité de surveillance continue.
Un dépôt de sang est géré au sein des Laboratoires de l’Etablissement, dans le cadre d’une convention signée avec l’Etablissement Français du Sang (EFS) de secteur.
Le technicien de laboratoire de nuit doit faire face à deux commandes simultanées de délivrance de Produits Sanguins Labiles (PSL), dans le cadre d’urgences vitales :
La procédure de commande est parfaitement respectée pour les deux situations.
A la réception de la commande pour le secteur naissance, la vérification administrative des PSL montre une discordance entre les produits commandés et les produits acheminés. Le laboratoire est prévenu.
Le technicien de laboratoire, en charge de la préparation des PSL, réalise la préparation des produits (distribution des poches, décongélation des PFC, …). Les brancardiers/coursiers sont prévenus pour assurer leur acheminement vers les secteurs concernés. Ils arrivent en même temps. Ils doivent assurer le transport des CGR dans un premier temps, et revenir ensuite chercher les PFC (temps de décongélation de 20 minutes incompressibles).
Le conteneur A, à destination de la salle de naissances et contenant les CGR est remis au brancardier qui doit prendre en charge les PSL pour l’USC, et inversement ; l’échange des commandes est donc mis en évidence par le secteur naissance. Leur appel téléphonique permet de donner l’alerte immédiatement à l’USC. Ces commandes de CGR sont donc réacheminées vers la bonne destination.
Les patients des ES A et B peuvent bénéficier de leur transfusion, mais avec près de 15 minutes de retard.
Le signalement de cet Evénement Indésirable Grave, sans conséquence pour aucun des patients, a tout de même inquiété les soignants : cette situation a mis l’équipe médico-soignante en charge de la parturiente en difficulté. Cette perte de temps à disposer des PSL aurait pu impacter le pronostic vital de cette jeune maman.
Notons que l’un des verrous dans le process de distribution a parfaitement joué son rôle en termes de sécurité.
Une analyse de risque a postériori est donc décidée, pour améliorer le processus de distribution des PSL.
Voici le résumé de ses conclusions, avec la mise en évidence de facteurs contributifs.
Facteur environnemental :
Deux commandes pour urgences vitales simultanées.
Les deux personnels sont arrivés en même temps pour prendre en charge les conteneurs.
Facteur travail en équipe :
Un seul préparateur pour gérer ces deux commandes, sachant que les procédures administratives sont lourdes ; la charge de travail est importante pour une seule personne.
Facteur institutionnel :
L’établissement a vu son activité globale augmenter depuis 3 ans, et plus particulièrement sur les champs suivants : Obstétrique – Urgences – Chirurgie lourde.
Facteur organisationnel :
Les conteneurs ne sont pas identifiés : service destinataire.
La vérification croisée entre le laboratoire et brancardier n’est pas réalisée, le technicien de laboratoire étant occupé à préparer les PFC.
Facteur individuel :
C’est la charge de travail lourde qui n’a pas permis la vérification croisée au départ des PSL.
Facteur tâches à effectuer :
Outre la préparation des PSL, la présence d’un seul technicien la nuit ne permet pas de prendre en charge les bilans sanguins de contrôle qui se rajoutent dans le cadre de ces urgences vitales, et qui doivent être traités dans des délais très courts.
En résumé :
- Une variation dans la charge de travail, avec des pics sur le versant lourd dans un créneau temps réduit, générateur de mode dégradé avec des verrous qui sautent.
- Une procédure de distribution des PSL adaptée à la situation, mais avec un défaut d’identification de la destination du conteneur.
- Une augmentation d’activité globale au niveau de l’institution qu’il convient de prendre en compte.
La procédure de distribution des PSL a été modifiée, en incluant l’identification du service destinataire sur le conteneur, et surtout en insistant sur la transmission croisée « transporteur »/technicien de laboratoire au départ du dépôt de sang.
Cette transmission pourra être validée uniquement si le « transporteur » est porteur de l’identité du patient.
La variation de la charge de travail la nuit au sein des laboratoires « est en constante augmentation » (propos recueillis au cours des entretiens réalisés dans le cadre de l’analyse de cet EIG).
De plus, « il est difficile d’effectuer la distribution des PSL et la réalisation des examens de laboratoire en même temps ».
Cette charge de travail a été évaluée pendant 2 mois, avec un recueil assez exhaustif de données sur cette période. Ce niveau d’exhaustivité a été possible par l’implication des techniciens de nuit dans cette démarche.
L’analyse de ces données a surtout montré des périodes de grosses surcharges régulières et répétées, pouvant mettre en difficulté le technicien, et bien évidemment les services de soins, notamment dans les contextes d’urgence.
La décision a été prise de renforcer les effectifs de nuit, et de passer à deux techniciens, par une mesure double de redéploiement d’une partie des effectifs de jour et de création de 1,5 ETP supplémentaire (sachant que 2,8 ETP étaient nécessaire pour doubler le poste sur ce créneau horaire).
Cette démarche de gestion des risques a permis d’anticiper d’autres événements indésirables graves, et de régler par la-même des problématiques organisationnelles qui perduraient.
C’est à partir d’une déclaration réalisée au sein d’un service de soins qu’une solution a été mise en œuvre dans un secteur tiers.
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