Une patiente est prise en charge afin de bénéficier d'une chirurgie par phacoémulsification et pose d’un implant artificiel sur l'oeil gauche. L’intervention se déroule sans incident particulier. Cependant, alors qu'il rédige le compte-rendu opératoire, le chirurgien constate qu’il a opéré cette patiente du mauvais côté. Découvrez l'analyse de cet événement indésirable qui rappelle notamment l'importance de l'approche systémique dans la sécurité des soins.
Mme K. est suivie depuis plusieurs années par son ophtalmologiste pour une baisse de l’acuité visuelle. Une adaptation des verres correcteurs a permis de passer ces dernières années avec un confort de vie très satisfaisant. Dans ses antécédents, on note une forte myopie.
Mais depuis quelques semaines, la situation s’est dégradée et a incité la patiente a consulté de nouveau le spécialiste. Elle décrit une vision qui est devenue floue, voilée, brouillée, avec des points dans le champ de vision, une mauvaise perception des contrastes et parfois des difficultés à distinguer les reliefs. Elle signale également des éblouissements importants en période nocturne et des perceptions de halos faits d’étoiles autour des sources de lumière artificielle.
La mesure de l’acuité visuelle objective la dégradation de la situation. L’examen des deux yeux à l’ophtalmoscope montre que les cristallins sont maintenant très opaques.
Le praticien propose alors à la patiente de bénéficier d’une chirurgie par phacoémulsification et pose d’un implant artificiel, et ce pour les 2 yeux. Du fait de sa forte myopie, le spécialiste préconise également d’opérer les deux yeux avec des dates rapprochées pour éviter les problèmes de vision induits par les différences de correction (transmission des informations au cerveau).
Il est convenu d’opérer l’œil gauche, puis l’œil droit 2 semaines plus tard. Cette intervention se fera sous anesthésie locale de type topique.
La consultation pré-anesthésique ne relève aucune contre-indication à la pratique de l’intervention.
La patiente se présente le jour J pour se faire opérer. L’entretien d’accueil au sein du service et au bloc opératoire valide les informations présentes sur le programme opératoire.
L’intervention se déroule sans difficulté : la phacoémulsification permet la fragmentation du cristallin par ultrasons et son aspiration extra-capsulaire. L’injection de substances viscoélastiques a permis le maintien des volumes oculaires. La mise en place de l’implant de cristallin artificiel a été réalisée sans problème, implant dont la puissance optique a été calculée en amont de l’intervention, et commandé pour être disponible le jour J.
Les soins de fin d’intervention sont réalisés, la patiente est transférée dans la pièce aménagée pour les circuits courts au bloc opératoire avant son retour en secteur ambulatoire.
Pendant que la salle d’opération est réhabilitée pour le malade suivant, le chirurgien rédige le compte-rendu opératoire de Mme K. dans son logiciel de suivi patient. C’est à ce moment qu’il constate que c’est l’œil droit qui a été opéré et non le gauche comme prévu. Très contrarié, il vérifie immédiatement les calculs des 2 implants (gauche et droit) qui montrent un écart minime entre les deux yeux.
Cette erreur devrait être récupérée par une compensation de l’autre implant et la correction des futures lunettes.
La patiente est prévenue de l’incident, reste confiante devant les explications données et se dit prête à revenir dans 2 semaines pour le deuxième œil.
La responsable du bloc opératoire a déclaré cet Événement Indésirable par le système de déclaration de l’établissement de santé. La commission Qualité-Gestion des risques lors de leur revue des EI ne l’a pas classé comme grave. Mais faisant partie des never events, il est décidé de réaliser une analyse dans le cadre d’une démarche de gestion des risques.
Les données analysées proviennent des éléments recueillis au préalable auprès des professionnels de santé qui sont intervenus dans la prise en charge de cette patiente : recueil réalisé lors d’entretiens individuels, analyse de documents, lecture du dossier.
C’est le chirurgien qui détecte l’erreur de côté après la réalisation de l’intervention en rédigeant le compte rendu opératoire par comparaison avec les éléments présents dans le dossier médical.
Pour résumer succinctement la genèse de cette erreur de côté :
Les conséquences pour le patient sont modérées :
Il est important de mettre en évidence les barrières de défenses qui ont été déficientes.
Rappel des bonnes pratiques sur les points de contrôles à réaliser tout au long du processus de l’acte chirurgical : ce retour d’expérience est prévu pour l’ensemble de l’équipe du bloc opératoire et des secteurs d’hospitalisation (ambulatoire et conventionnelle) à visée de sensibilisation à partir d’un cas concret pour alerter l’ensemble des professionnels sur la valeur ajoutée des barrières de prévention à mettre en œuvre. Le concept du fromage suisse de James REASON est retenu à titre d’illustration.
Rappel particulier sur l’utilisation de la check-list de sécurité au bloc opératoire proposée par la Haute Autorité de Santé : barrière de prévention ultime avant l’acte chirurgical.
Discussions sur l’implication du patient dans sa prise en charge :
A titre indicatif, lors d’interventions sur des organes pairs la mise en place de détrompeurs en amont de l’intervention est toujours un plus (marquage du côté à opérer, détrompeur coloré dans le dossier, etc).
En savoir plus :
Le patient partenaire de la sécurité des soins - Fiche méthode 610 - Dr Marie-Christine MOLL, gestionnaire de risques, Directeur Scientifique de la Prévention Médicale, Vice-Présidente de la SoFraSimS, chargée de mission HAS
La sécurité des soins nécessite une approche systémique pour tout processus de prise en charge d’un patient, que ce soit au bloc opératoire ou dans d’autres secteurs.
Une approche systémique implique une démarche collective de tous les acteurs de soins.
C’est par la vigilance constante de tous, patient inclus, que les prises en charge seront sécures pour les malades et surtout pour les soignants qui pourraient être impactés par les conséquences d’une erreur = effet seconde victime.
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