Ervin, J., Taouk, Y., Hewitt, B., & King, T. (2023). The association between unpaid labour and mental health in working-age adults in Australia from 2002 to 2020: a longitudinal population-based cohort study. The Lancet Public Health, 8(4), e276-e285.
Un éditorial et un article du Lancet sur un sujet difficile.
Le travail rémunéré n’est qu’une (petite) partie du travail réellement produit en santé. De nombreuses contributions sont bénévoles, non payées, et pourtant d’importance cruciale pour le résultat médical. Les femmes contribuent plus à cette forme de travail bénévole que les hommes, et ce, dans le monde entier.
Les femmes sont aussi les premières à sacrifier leurs heures de travail normal pour se consacrer bénévolement à des actions de santé pour les proches. Même quand elles sont payées, c’est moins que pour les hommes, et avec moins de niveau de responsabilité.
Une récente étude Australienne publiée dans le Lancet public health (Ervin, 2023) fait le point sur cette situation problématique en adoptant une méthode longitudinale et en se centrant sur les corrélations éventuelles entre ce travail bénévole en santé et la dégradation de la santé mentale pour les hommes et les femmes (en poursuite de trois études précédentes pointant déjà cette possible relation délétère).
L’étude considère plusieurs formes de travail bénévole (travail domestique chez des patients, garde d’enfant, soins à des adultes). Le travail domestique est la partie la plus associée à la survenue de problèmes mentaux aussi bien pour les aidants hommes que pour les aidants femmes. Les soins aux personnes proches sont par contre une source de problèmes surtout pour les femmes ; inversement, les heures passées à faire les courses ou à aider par des actions extérieures au domicile sont plutôt considérées comme positives pour l’état de santé mental des hommes ; en regardant de plus près, les soins donnés aux enfants sont aussi plutôt sources positives pour l’état de santé mental des femmes aidantes, alors que les soins donnés aux adultes sont plus connotés négativement ; cette différence s’explique sans doute par le fait que les soins donnés aux (à ses) enfants sont plus ‘par choix’ personnel des aidantes femmes que les soins donnés aux adultes mêmes proches souvent dans une logique de déclin. Ces distinctions sont importantes et doivent encourager à ne pas tout confondre quand on analyse le travail des aidants. Le travail n’est pas homogène, y compris quand on zoome sur les questions de genre, et ceci est aussi vrai pour du travail rémunéré que pour du travail bénévole.
Les recherches à venir en Australie vont s’étendre au travail, cette fois rémunéré, mais à faible valeur pour les acteurs et à fort potentiel de risque psychosociaux (RPS), tels que les longues heures de ménages et d’aide à domicile données aux adultes socialement défavorisés ou déclinants. Ce type d’aide, bénévole ou pas, reste très associée aux survenues de RPS et pose un réel problème pour l’emploi. Les auteurs encouragent toutes les nations à emboiter le pas de ces études et à mettre en place une analyse genrée et sur le fond des tâches à couvrir pour une prise en charge adaptée des aidants payés ou bénévoles qui sont – et resteront- une composante majeure d’un système de soins efficace.
Un sujet majeur.