Mme F. est prise en charge au bloc opératoire pour une césarienne programmée. Elle est enceinte de son troisième enfant et l'obstétricien qui suit cette parturiente lui propose ce mode d'accouchement car le bébé est en siège décomplété.
Mme F. est prise en charge au Bloc Opératoire pour une césarienne programmée …
• Mme F. entre à l’Hôpital, en service Maternité, pour bénéficier d’une césarienne, dans le cadre d’une intervention programmée. Elle est âgée de 34 ans et elle est enceinte de son 3° enfant. L’obstétricien, qui suit cette parturiente, lui a proposé ce mode d’accouchement, car le bébé est en siège décomplété et la pelvimétrie par tomodensitométrie montre une inadéquation entre les structures osseuses et le passage du fœtus.
• Ce mode d’accouchement a été accepté par la parturiente. A son entrée, elle est prise en charge par une sage femme, qui confirme la présentation de l’enfant en intra-utérin, lors d’une échographie de contrôle et réalise un monitoring qui montre un rythme fœtal sans particularité. La jeune femme est donc transférée au Bloc Opératoire et prise en charge par une équipe pluridisciplinaire.
• L’équipe d’Anesthésie (composée d’un Médecin anesthésiste Réanimateur (MAR) et d’un Infirmier Anesthésiste I(ADE)) l’installe sur la table d’opération pour pouvoir bénéficier d’une rachianesthésie (technique anesthésique proposée à la patiente et validée par elle). L’anesthésie une fois réalisée sans difficulté particulière, Mme F. est positionnée sur la table d’opération en Décubitus Dorsal avec un « roulis à gauche » et les paramètres vitaux sont surveillés, et notamment la Tension Artérielle ; un mélange Ephédrine* - Néosynéphrine* est administré en Quantité Suffisante pour maintenir le chiffre tensionnel de référence.
• Le conjoint de la patiente est alors autorisé à venir rejoindre son épouse pour lui permettre d’assister ensemble à la naissance de leur enfant.
• Le MAR demande à l’IADE de lui donner la seringue contenant l’antibioprophylaxie et lui administre. Quelques secondes plus tard, la parturiente perd connaissance et la saturation en oxygène baisse à 90%. Les mesures conservatoires sont immédiatement mises en œuvre pour palier à cette défaillance respiratoire, et l’on demande au conjoint de sortir de la salle d’opération en lui expliquant que son épouse a un malaise et que sa présence n’est plus possible dans ce contexte (explications données en amont par le MAR sur cette attitude en cas de complications).
• Le MAR constate dans sa recherche d’explications à cette situation que la seringue que lui a tendu l’IADE était en fait une seringue de Thiopental*, narcotique qui constitue la dotation médicamenteuse préparée tous les matins dans le cadre de la procédure de préparation du site d’anesthésie du secteur d’anesthésie.
• L’anesthésie s’est donc convertie en Anesthésie Générale avec intubation orotrachéale, la césarienne s’est déroulée sans problème particulier, le bébé est né avec un score d’Apgar de 10, et il a été amené auprès de son papa très rapidement. Ce dernier a été également rassuré sur l’état de santé de la maman. La patiente s’est réveillée en fin d’intervention chirurgicale, et le rapprochement de la famille a été organisée aussitôt que possible pour rassurer tout le monde.
• Au final, la maman va bien, le bébé également et le papa est rassuré.
Cet incident n’a pas généré de prolongation d’hospitalisation ou de séjour en soins intensifs, ni pour la maman, ni pour le bébé, mais l’annonce d’un dommage associé aux soins à expliquer à la famille dans ce contexte particulier n’a pas été facile.
La restauration d’un climat de confiance avec la famille a été compliquée à mettre en œuvre. La transparence et les explications des soignants dans cette situation ont permis de faire baisser le niveau de tension palpable : le couple était très déçu de n’avoir pu vivre cette naissance comme ils l’avaient imaginé, sachant que les 2 premiers enfants étaient nés par voie basse sans difficulté particulière.
Cet Événement Indésirable Grave (EIG) a questionné l’ensemble des acteurs de santé impliqués dans la prise en charge de Mme F., et la décision de confier l’enquête sur cette situation à la Gestionnaire de Risques de la structure a permis de rendre les conclusions suivantes.
La méthode ALARM, recommandée par la Haute Autorité de Santé, est retenue.
Erreur médicamenteuse : générant la mise en œuvre de mesures conservatoires face à une dépression respiratoire et un changement de protocole anesthésique imprévu.
Facteurs de la | Causes identifiées |
Facteurs liés au patient |
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Facteurs liés aux tâches à accomplir |
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Facteurs liés à l’individu (personnel de la structure) |
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Facteurs liés à l’équipe |
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Facteurs liés à l’environnement de travail |
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Facteurs liés à l’organisation et au management |
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Facteurs liés au contexte institutionnel |
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Barrière qui a arrêté l’incident : barrière de récupération et d’atténuation
Barrières qui n’ont pas fonctionné
L’analyse de cette situation a conduit les professionnels à réfléchir sur les points suivants :
Une nouvelle erreur humaine à l’origine de cet incident, qui n’a eu aucune conséquence sur le pronostic vital de la parturiente, mais qui a généré une grande déception pour ce couple qui avait imaginé la naissance de ce 3° enfant autrement. Beaucoup d’amertume, de frustration et d’inquiétude pour le conjoint qui n’avait pas compris la situation.
Si cette analyse a mis en lumière un certain nombre de facteurs contributifs à la survenue de cet événement indésirable, nous pouvons retenir néanmoins que sa raison première est l’absence des vérifications habituelles à toute administration.
Le respect des fondamentaux, notamment de sécurité, dans les pratiques de soins reste le point essentiel pour éviter cette typologie d’incident, car chacun s’accordera à dire qu’il était évitable.
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