Il est important d’insister auprès du propriétaire de l’animal sur l’importance de la fidélité à un vétérinaire traitant, de façon à disposer d’une anamnèse complète et de l’exhaustivité des antécédents médico-chirurgicaux de l’animal. Ces éléments permettront d’aboutir rapidement à un diagnostic pertinent, bénéfique à la sécurité de la prise en charge de l’animal.
Une chatte, née en 2012, est (irrégulièrement) suivie par un cabinet vétérinaire, sa propriétaire consultant d’autres vétérinaires de temps à autre, sans en informer ceux qui se considéraient comme les vétérinaires traitants (ou habituels) de l’animal.
La chatte leur est présentée sans rendez-vous en 2017 pour une inflammation oculaire (conjonctivite).
Lors de la consultation, un diagnostic de conjonctivite est confirmé. Une gingivite est mise en évidence. Un amaigrissement anormal est décrit par la propriétaire, laquelle ne rapporte aucune manifestation de polydipsie, polyurie, polyphagie.
Il est présenté au vétérinaire un bilan biologique établi dans un autre établissement consulté trois mois plus tôt pour stomatite : glycémie, azotémie et créatininémie normales. Un nouveau bilan biologique est alors proposé et refusé. Une injection de corticoïde, effectuée dans cet autre établissement trois mois plus tôt, est alors renouvelée.
Le lendemain, la chatte est franchement anorexique et prostrée. La propriétaire rappelle le cabinet : il lui est proposé de la ramener immédiatement. Elle ne donne pas suite à cette proposition et ne rappelle que tard dans la soirée. L’animal, alors prostré, est pris en charge par le service de garde d’un autre établissement de soins vétérinaires.
La chatte y est hospitalisée, les examens biologiques refusés la veille y sont acceptés et largement amplifiés. Ils conduisent progressivement à un diagnostic de diabète sucré.
Au cours de l’hospitalisation, qui se prolonge plusieurs jours, une infection respiratoire (coryza) se déclare sur cette chatte qui n’était plus vaccinée contre la calicivirose ni contre la rhinotrachéite virale.
Puis la glycémie se stabilise, l’état général redevient bon, l’appétit revient et la chatte retrouve sa propriétaire huit jours plus tard. Un traitement insulinique de diabète sucré, complété par un traitement du coryza, est prescrit. Il est mis en œuvre dans un nouvel établissement de soins. Le pronostic demeure toutefois réservé.
La propriétaire considère que l’injection de corticoïde sur son animal, révélé diabétique le lendemain, était une erreur fautive. Elle met en cause la RCP du praticien. Elle sera déboutée de sa demande.
L’injection de corticoïde est en effet généralement contre-indiquée en cas de diabète sucré. Cette injection peut donc être considérée comme une erreur médicale, fautive selon la propriétaire. La faute invoquée n’a pas pour autant été retenue puisque la propriétaire n’avait pas accepté que la glycémie soit préalablement vérifiée. Et même si cette injection était inappropriée, elle n’a pas pour autant, à elle seule, provoqué un diabète sucré insulinodépendant en moins de 24 heures. Il était manifestement latent ou déclaré au moment de la consultation.
La détérioration rapide de l’état général de cette chatte à la suite des soins constitue objectivement un EIG, en ce sens qu’elle était inattendue, tant par le vétérinaire que par la propriétaire, et susceptible de mettre en cause le pronostic vital.
Elle résulte d’un dysfonctionnement, d’abord dû à la propriétaire de l’animal elle-même. Dans le cadre d’une consultation impromptue, elle n’a pas indiqué au vétérinaire l’ensemble des symptômes observés et surtout, elle a refusé le bilan biologique souhaité ce jour-là par le praticien. Or, ce bilan aurait permis de suspecter le diabète sucré et donc de changer significativement l’attitude thérapeutique.
L’appréciation d’un EIG (erreur, dysfonctionnement) lié aux soins en médecine vétérinaire, en l’absence de système de déclaration organisé, repose plutôt sur une appréciation et une déclaration a posteriori, à partir d’un échange contradictoire entre le propriétaire et le vétérinaire, le plus souvent en présence d’un tiers expert.
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