Lenzer J. Why we can’t trust clinical guidelines, BMJ, 2013, 346 :f3830
Les recommandations sont souvent contradictoires ou peu convaincantes. L’article considère les biais de constructions de ces recommandations
Le poids des discrédits historiques arrive en premier. Par exemple, dans les années 90, les neurochirurgiens US reçurent chacun une lettre personnelle leur demandant d’immédiatement suivre une nouvelle recommandation sur les traumatismes du rachis recommandant une mise sous forte dose de corticoïdes. Rapidement, les avis divergèrent dans la communauté considérant que cette recommandation était dangereuse : décès, complications, allongement de la durée d’hospitalisation. Dans ce contexte, 60% des neurochirurgiens ont reconnu suivre cette recommandation plus pour des raisons médico légales que pour sa justesse; seulement 11% était réellement convaincu. Cette recommandation a finalement été abandonnée en 2014.
Les convictions des leaders, entretenus par leurs conflits d’intérêt avec l’industrie, sont une seconde source d’erreur récurrente. Une récente étude montre sans surprise que 71% des présidents de commission de recommandations et 90,5% de leurs assesseurs ont des conflits d’intérêts.
L’enthousiasme, les croyances de certains, et les conjonctures favorables d’attente de la communauté sur certains traitements peuvent aussi mettre en route une innovation soit disant prometteuse avant même que l’on ait vérifié sa pertinence et l’entretenir contre toute évidence. Ce fut le cas en 1998 avec l’arrivée de l’Alteplace tPA (commercialisé sous le nom d’Actilyse en Europe, Enzime qui transforme le plamisnogène en plasmine) comme médicament thrombolytique précoce (0-6hoo) miracle dans les AVC ou infarctus, donnant lieu à un usage intense prouvé par quelques essais thérapeutiques (discutables sur leurs méthodes), pour être finalement dénié en 2011, en reconsidérant des essais thérapeutiques de bonne qualité jusque là négligés où les résultats étaient clairement négatifs mais contre l’évidence des croyances du moment.
Non seulement, les croyances peuvent être des moteurs importants de diffusion de l’innovation, mais elles créent aussi un marché considérable qui rend évidemment en retour plus difficile de les remettre en cause, et souvent les sociétés savantes deviennent elles mêmes les relais de l’erreur ; ce fut le cas par exemple de l’usage d’erythropoeitine chez les patients anémiés en insuffisance rénale, jugé performante (sans preuve formelle) par les professionnels (croyance) formellement déconseillée par un article dans le New England en 2006, et pourtant objet d’une recommandation du collège de néphrologie US en 2007.
Très bel article.