Le concept de "soins de faible valeur" ou de "faible pertinence" (Low-Value Care) recouvre tous les traitements qui n’ont pas de démonstration de bénéfice prouvé pour la santé, voire qui sont sources d’inconvénients et d’événements indésirables potentiels (EI).
Selon plusieurs études conduites en Australie, Canada, Espagne, Brésil, et États-Unis, 25 à 30 % des soins pratiqués entrent dans cette catégorie et peuvent atteindre, dans les pires cas, 80 % pour certaines procédures de soins.
Les campagnes nationales de réduction de ce risque sont nombreuses, au premier rang desquelles on trouve l’initiative "choosing wisely" des Américains (Glaziou 2013) et celle du "too much" des Anglais (2015). Elles visent en premier les niveaux micro et méso des pratiques et comportements quotidiens et s’appuient sur les bases de données des collèges, les audits et les feedbacks personnalisés.
De nombreuses actions "top-down" des directions de la santé ont été engagées, avec toutes les incitations financières du paiement à la performance pour abandonner des pratiques de faible valeur (Disinvestment strategies) en les pénalisant.
Un premier point faible dans ce cas est souvent l’unicité de la procédure s’appliquant à des contextes d’exercices totalement différents (comme le salariat versus l’exercice libéral), mais il existe bien d’autres obstacles à l’efficacité du concept.
A titre d’exemple, l’evidence based intervention (EBI) disinvestment program (Anderson, 2022) visait 17 pratiques à faible valeur médicale, avec deux objectifs complémentaires :
En comparant des procédures non ciblées par les pénalités de paiement et celles ciblées, l’amélioration constatée des comportements s’avère extrêmement limitée avec une réduction d’à peine 0,1 % en volume des procédures non pertinentes.
Ce (très faible) résultat ne fait que corroborer bien d’autres résultats déjà publiés. On reconnaît aussi que toutes ces interventions sont complexes dans leur mécanisme de calcul de la pénalité et sont régulièrement sujettes à des manipulations pour en réduire l’impact négatif.
Plusieurs points peuvent l’expliquer (Patey, 2022) :
Les meilleurs résultats publiés dans la littérature, qui peuvent aller jusqu’à 48 % de changements des pratiques (Grimshaw 2020), s’obtiennent par un accompagnement des pairs et un mixte de démarches top down et bottom-up avec une forte participation, un benchmark de proximité et une implication active des acteurs médicaux chez qui on voudrait voir modifier les pratiques.
Les seuls contrôles par audits ou par indicateurs externes ne suffisent pas ni à faire bouger les pratiques, ni réellement à vérifier l’ampleur et la durée dans le temps des changements.