Erreur d'identité en psychiatrie

Tout sur la gestion des risques en santé
                et la sécurité du patient

Erreur d'identité en psychiatrie

  • Réduire le texte de la page
  • Agrandir le texte de la page
  • Facebook
  • Twitter
  • Messages0
  • Imprimer la page
  • Un aide-soignant pose un bracelet d'identification à une patiente hospitalisée - La Prévention Médicale

L’identitovigilance est une étape indispensable pour sécuriser tout parcours de soins. Elle commence dès la constitution du dossier administratif du patient et se poursuit tout au long de sa prise en charge.
Des barrières de sécurité doivent être mises en œuvre, quel que soit le secteur d’activité, afin de garantir le bon soin au bon patient.

Auteur : Julien Vandenbossche, Cadre de santé IADE, Coordonnateur de la Gestion des risques associés aux soins & Bruno FRATTINI, Cadre Supérieur de Santé IADE, Expert en prévention des risques / MAJ : 22/10/2024

Présentation du contexte

Dans le programme opératoire du jour, une activité de sismothérapie est planifiée : 3 patientes sont attendues au bloc opératoire pour bénéficier d’une électro convulsivothérapie (ECT) sous anesthésie générale.

Ces patientes sont adressées par une structure de soins extérieure spécialisée en psychiatrie. Elles bénéficient de ce fait d’une hospitalisation ambulatoire. Le process validé par les deux établissements prévoit que les malades éligibles à ce traitement sont accompagnés par un professionnel de l’établissement adresseur.

L’aide-soignante du secteur ambulatoire accueille seulement deux patientes sur les trois prévues. Elle vérifie la demande médicale et la fiche de liaison paramédicale des malades avec leur accompagnante. Puis elle les installe en chambre double…
Elle pose les bracelets d’identification avec l’accompagnante.

Elle transmet également à l’infirmière du secteur ambulatoire et au bloc opératoire l’information de l’absence d’une des patientes programmées.

Mme G. arrive en première position pour bénéficier de la sismothérapie. L’acte est réalisé sans difficulté et la patiente est ensuite installée en salle de surveillance post-interventionnelle (SSPI).

Mme C. arrive en seconde position pour la même thérapeutique. L’ECT est délivrée par la psychiatre. 

A l’issue des séances, le médecin anesthésiste réanimateur (MAR), prend les dossiers des malades afin de rédiger les consignes et prescriptions post-anesthésiques et s’aperçoit alors qu’il a entre les mains le dossier de Mme F., et le dossier de Mme G.

Après quelques échanges avec l’accompagnante des patientes et la psychiatre de l’établissement adresseur, il s’avère que le dossier de Mme F. - autre patiente qui devait bénéficier d’une ECT - a été amené en lieu et place du dossier de Mme C.

Après débriefing entre médecins, il s’avère que Mme C. a reçu une ECT d’intensité plus importante que celle initialement prévue (celle de Mme F.) mais que cela n’aura pas de conséquence sur le devenir et les résultats attendus de la thérapeutique mise en œuvre.

Devant cette erreur d’identité, le MAR et l’infirmière anesthésiste déclarent cet événement indésirable à destination du référent d’identitovigilance, via le système de déclaration de l’établissement de santé. 
 

Conséquences

Cette erreur d’identité n’a pas eu de conséquences graves pour la patiente.

Néanmoins, les équipes soignantes concernées par cette erreur sont préoccupées des impacts potentiels d’un tel événement indésirable pour l’avenir…

Méthodologie et analyse

La Cellule d’identitovigilance (CIV) décide de réaliser une analyse de cet incident afin de pouvoir relayer aux équipes les facteurs contributifs identifiés qui ont permis la genèse de cette erreur, afin d’initier une démarche pédagogique en partage.

L’objectif de ce retour d’expérience est donc de comprendre le mécanisme de cet événement et d’éviter de renouveler ce type d’incident dans l’avenir.

Une analyse de risque a posteriori est donc réalisée

Dans cette analyse, seuls les éléments contributifs à la recherche des causes conduisant à cette erreur seront recherchés. La méthode ALARM est retenue.

Les données analysées proviennent des éléments recueillis au préalable auprès des professionnels de santé qui sont intervenus dans la prise en charge de cette patiente : recueil réalisé lors d’entretiens individuels, analyse de documents, lecture du dossier.

Cause immédiate

C’est le MAR qui s’est aperçu de l’erreur d’identité lors des contrôles d’identification secondaire réalisés pour la rédaction des consignes post-anesthésiques.

Causes profondes


En résumé

  • Une patiente adressée avec les documents médicaux d’une autre patiente – patiente récusée.
  • Des procédures d’identitovigilance existantes dans les 2 structures de soins, mais qui ne sont pas toujours appliquées.
  • Une procédure d’identitovigilance mal appliquée par le service adresseur, l’accompagnante ayant sélectionné un mauvais dossier ; il convient de préciser que les patientes confondues portent le même prénom : les professionnels de cette structure ont pour habitude d’appeler les patients par leur prénom.
  • L’établissement adresseur n’applique pas encore la nouvelle politique d’identitovigilance.
  • Une procédure d’identitovigilance mal appliquée en secteur ambulatoire par une aide-soignante récemment arrivée dans le service. Pas de contrôle de l’IDE.
  • Des vérifications d’identité mal appliquées au bloc opératoire.
  • Des systèmes d’information ne communiquant pas entre eux, et ne permettant pas le transfert de documents médicaux de manière sécurisée.
  • Des modalités de transmission d’informations déficientes avec de nombreuses imprécisions.
  • La thématique "interruption de tâches" est également une cause possible d’erreur.
     

Partant de cette analyse, il est important de mettre en évidence les barrières de défenses qui ont été déficientes.  

Barrières de défense

Les pistes de réflexion et/ou d'amélioration

  • Pose du bracelet d’identification avant le transfert de l’établissement de santé adresseur
    Les professionnels de santé connaissent les patients, cette solution retenue doit permettre de diminuer le risque d’erreur.
  • Demande à l’établissement adresseur d’identifier les malades avec l’INS
    Cela permettra un classement sécurisé des données médicales et la possibilité de les consulter en amont de l’examen.
  • Adressage des demandes d’ECT par courriel
    Ce document sera intégré dans le dossier patient de l’établissement recevant les patients. 
  • Sensibilisation/formation des accompagnants sur les bonnes pratiques d’identitovigilance
    Leur implication dans cette démarche sécuritaire est essentielle.
  • Partage et sensibilisation de cet Événement Indésirable 
    Pour expliquer les vulnérabilités créées par des modes dégradés aux équipes impliquées par cette prise en charge.
  • Réflexion sur des modalités de transmission d’informations efficaces et pertinentes
    Outils SAED de la Haute Autorité de Santé par exemple ou autres modalités à tester collectivement.
  • Sensibilisation sur les interruptions de tâches
    Par l’intermédiaire de quick formation répétée…

Conclusion

La bonne identification du patient bénéficiant d’un parcours de soins doit être la première étape de sa prise en charge. C’est un facteur clé pour la sécurité des malades pris en charge.

L’implication de tous les acteurs est déterminante pour obtenir un niveau de sécurité optimal en appliquant les process.

Selon la célèbre formule, "La confiance n’exclut pas le contrôle" est la base des vérifications multiples, gage d’une sécurité renforcée pour les patients.

Crédit photo : AMELIE-BENOIST / IMAGE POINT FR / BSIP