Un jeune patient autiste de 17 ans est pris en charge par le service des Urgences de son secteur pour douleurs abdominales avec antécédent de pancréatite.
Trois interventions sous anesthésie générales seront rendues nécessaires suite au non-respect des barrières de prévention dans la prise en charge de ce patient vulnérable.
Mr. T, jeune autiste de 17 ans, est orienté par son médecin traitant vers le service d’Urgences de secteur. Les parents du jeune patient sont inquiets pour leur enfant, car ce dernier se plaint d’une douleur abdominale, a priori violente, a vomi à plusieurs reprises et présente une hyperthermie à 38°4. Ils pensent reconnaître le tableau clinique rencontré il y a plusieurs années lorsque leur enfant avait fait une pancréatite à l’âge de 8 ans. Il convient de préciser que ce jeune enfant avait été opéré à l’âge de 7 ans d’un kyste du cholédoque, avec anastomose hépato-jéjunale. Dans les antécédents relevés, cet adolescent présente également un terrain asthmatique avec notion d’allergies multiples.
La prise en charge aux Urgences confirme les craintes des parents, à savoir que leur fils fait bien un nouvel épisode de pancréatite au vu du bilan sanguin réalisé non sans difficulté (patient très agité). Le service de Pédiatrie l’accueille dans son secteur d’hospitalisation.
Un Interniste et un Gastro-entérologue sont sollicités pour un avis, et collégialement décident de proposer aux parents la réalisation d’un examen d’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) des voies biliaires au vu des antécédents chirurgicaux et médicaux de leur fils. Cet examen est accepté par les détenteurs de l’autorité parentale après avoir expliqué qu’il est nécessaire de le réaliser sous Anesthésie Générale (AG).
Le médecin anesthésiste réanimateur (MAR) en charge des visites dans les secteurs d’hospitalisation est sollicité pour réaliser la consultation pré-anesthésique, en présence des parents. Les explications sont données concernant les prérequis nécessaires pour assurer les soins dans de bonnes conditions de sécurité : jeûne et surtout l’absence de bijoux et de tout objet métallique. L’examen est planifié pour le lendemain matin.
Une prémédication orale est donnée en chambre, une oxymétrie de pouls est installée de principe. Le jeune patient se calme tout doucement sous l’effet des médicaments et avec la présence de la maman. Un brancardier arrive dans le service pour le transférer vers le secteur d’Imagerie Médicale. La maman demande si elle peut accompagner son fils : une réponse négative lui est signifiée. Elle signale néanmoins la présence du capteur de saturomètre laissé en place (seulement débranché). L’équipe soignante de pédiatrie autorise leur collègue brancardier à transporter Mr. T.
A l’arrivée en secteur IRM, le patient est confié à l’équipe d’anesthésie et à l’équipe de radiologie présentes. Une perfusion est posée du côté Gauche sans difficulté. Le matériel de monitorage est installé, l’AG est débutée, l’IRM peut alors débuter. L’examen d’imagerie sera réalisé avec quelques difficultés en raison de mouvements abdominaux amples.
A la fin de l’examen, le jeune garçon est réveillé et l’on découvre alors le capteur de saturomètre sur son index Droit. Il est enlevé et l’on découvre une brûlure sur le doigt, de la taille d’une pièce de 5 centimes d’Euros. Le médecin anesthésiste évalue sa profondeur à un 3ème degré. Il contacte immédiatement un chirurgien de la main présent au sein de l’établissement pour un avis spécialisé. Ce dernier confirme le diagnostic et prescrit dans un premier temps un pansement de couverture par JELONET™ et le médecin anesthésiste des antalgiques.
Les parents sont ensuite prévenus par le radiologue et le MAR. Ceux-ci sont particulièrement mécontents et le font savoir vivement.
Les suites de la prise en charge : le jeune homme devra être pris en charge au bloc opératoire pour une excision des tissus nécrotiques sous AG une première fois, puis un lambeau de couverture sous AG une seconde fois.
L’évolution de sa pathologie digestive obligera la pose d’une prothèse biliaire 2 semaines après la réalisation de l’IRM.
Au total, Mr T. aura eu 3 AG en 2 semaines.
Du fait de son handicap, les soins locaux de la brûlure seront particulièrement longs puisqu’ils dureront plus de 5 mois.
Cette erreur technique a eu plusieurs conséquences :
Le médecin anesthésiste, à l’issue de l’examen, rédige une fiche de déclaration indésirable.
Le COVIRIS de la structure, mis au courant lors de leur revue mensuelle d’Événements Indésirables, demande une analyse de cet incident qu’il considère grave puisque plusieurs défaillances sont suspectées.
La méthode ALARM, recommandée par la Haute Autorité de Santé, est retenue.
C’est l’oubli de la pince du saturomètre non compatible avec l’environnement magnétique de l’IRM qui est à l’origine de la brûlure du jeune patient.
Un retour d’expérience a été réalisé en réunion de cadres de santé de l’établissement. Le rappel de l’existence de la procédure sur la GED et de l’importance des vérifications préconisées est demandé pour tous les professionnels infirmiers et aides-soignants.
Chaque fois que possible, il convient de favoriser la présence d’un membre des proches du patient. Dans la situation suivante, l’entretien d’accueil avec la maman aurait pu permettre la détection de la présence du capteur. En tout cas, chaque fois qu’une communication avec un malade est complexe, cette solution est à retenir.
La dématérialisation des check-lists est actée par le COVIRIS. L’équipe en charge du paramétrage du DPI est saisie du dossier. Il sera mis à disposition des équipes soignantes et de l’équipe de radiologie. L’accès du DPI sur tous les postes informatiques de l’établissement permettra une consultation et une vérification plus aisée.
A été évoquée la possibilité de mettre en place un détecteur de métaux à l’entrée du secteur IRM. Au vu de la fréquence des incidents recensés au sein de l’établissement, et d’une revue de la littérature sur la thématique, les professionnels de santé n’ont pas jugé utile d’équiper le service d’un tel dispositif. Le respect rigoureux des règles a été évalué suffisant pour prévenir tout risque d’accident.
Un incident avec des conséquences graves pour ce jeune patient : plusieurs interventions chirurgicales auront été nécessaires pour réparer les dommages.
Il est survenu parce que plusieurs barrières de prévention n’ont pas été respectées alors que la procédure avait été rédigée et les outils créés.
Cette prévention doit également être plus intense encore lorsque des situations à risques sont identifiées.
Dans le cas présent, ce retour d’expérience doit nous apprendre que notre attention doit être davantage centrée sur des patients plus vulnérables et dépendant des équipes soignantes ainsi que sur l’écoute du patient et/ou de ses proches, facteur important de récupération des erreurs.