Erreur de posologie lors d'une administration de médicament

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Analyse d'un cas d'erreur de posologie lors d'un accouchement : la sage femme qui a la patiente en charge, demande à l’infirmière qui l’accompagne, d’injecter 100 mcg de NITRONAL*. La seringue préparée, selon la procédure du service, est diluée à 100 mcg/ml. La seringue est injectée en totalité, soit 10 fois la dose prévue dans le protocole...

  • Paramédical
Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 17/06/2020

Anamnèse

Mme P., enceinte de 41 SA + 4 (41 semaines d’aménorrhée + 4 jours), est admise en salle de naissance pour début de travail (col modifié) après déclenchement par PROPESS* à 14h15.

Elle bénéficie de la pose d’une péridurale à 14h25, pour débuter une analgésie rapide devant des contractions très douloureuses.

A 14h35, la parturiente présente une hypertonie utérine et hypercinésie de fréquence, avec ralentissement du rythme fœtal.

La sage femme qui a la patiente en charge, demande à l’infirmière qui l’accompagne, d’injecter 100 mcg de NITRONAL*. La seringue préparée, selon la procédure du service, est diluée à 100 mcg/ml. La seringue est injectée en totalité, soit 10 fois la dose prévue dans le protocole.

La patiente présente, dans les suites immédiates de cette administration, une hypotension modérée qui est corrigée par le médecin anesthésiste avec de l’EPHEDRINE* à doses titrées.

Cette erreur de posologie a été sans conséquence pour la patiente.
 

Analyse succincte de cette problématique

L’absence de conséquences graves de cet accident n’a pas forcément rassuré le médecin anesthésiste qui a demandé une analyse de cet événement. Les éléments suivants sont à prendre en compte :

- l’administration du médicament a été réalisée dans une situation d’urgence,
- l’infirmière était une professionnelle de santé fraîchement diplômée (deux mois),
- l’infirmière comptait seulement trois journées de travail au sein du service,
- la seringue de NITRONAL* n’a pas été préparée par la personne qui a réalisé l’injection.

Le constat montre que même s’il y a eu une réaction adaptée de l’ensemble des acteurs présents, le risque que cet incident se reproduise est très probable, générant de ce fait une augmentation de la morbidité pour les parturientes.

Une analyse de risque a posteriori est donc décidée et confiée au gestionnaire de risques de l’établissement pour comprendre la genèse du dysfonctionnement, et ainsi construire un plan d’actions pour éviter la récurrence de cet incident.

La méthode ALARM est utilisée afin de déterminer les facteurs contributifs.

Voici le résumé de ses conclusions.

Facteurs contributifs

Facteur environnemental :

Les effectifs étaient en nombre suffisant, mais avec la présence d’une jeune diplômée qui ne possède pas le retour d’expérience suffisant pour être efficace dans ces situations d’urgence : méconnaissance du secteur, des organisations de travail, des procédures et protocoles de soins.

Facteur travail en équipe :

Les automatismes entre les différents métiers sont optimaux lorsque les professionnels de santé ont l’habitude de travailler ensemble.

Facteur institutionnel :

Dans cet établissement, les périodes d’accueil et d’intégration sont au maximum de 2 journées dans ces secteurs (hors secteurs urgences et soins intensifs). Cette période semble insuffisante pour une familiarisation avec les organisations, procédures et protocoles du secteur de soins du service.

Facteur organisationnel :

La procédure concernant l’administration du NITRONAL* est rédigée et appliquée depuis plusieurs années dans le service. La procédure prévoit que ce médicament est préparé chaque matin par l’infirmière qui relève l’équipe de nuit. La seringue préparée est conservée au réfrigérateur.

Facteur individuel :

La jeune infirmière, dans sa période d’intégration au service, s’était appropriée les fondamentaux du fonctionnement du service, c'est-à-dire les situations de soins couramment rencontrées, mais pas celles moins fréquentes. La durée d’intégration de 2 jours ne permet pas d’être confronté à tous les contextes.

Facteur tâches à effectuer :

En lien avec la formation et les compétences : le diplôme récent de l’infirmière et son retour d’expérience modeste (surtout sur ce secteur) ne permettent pas une efficience face à cette situation de soins nouvelle pour cette jeune professionnelle de santé.

En lien avec la fréquence et l’importance de cette situation de soins : elle doit faire partie des éléments à transmettre dans le cadre de l’arrivée d’une professionnelle de santé nouvelle. La méconnaissance de ce protocole de soins ne permet pas d’avoir un niveau d’efficacité suffisant à la situation d’urgence.

En lien avec la réalisation du soin : le fait de préparer le médicament dilué et de le conserver au frais dans la salle de soins n’est pas forcément adapté (lieu de stockage excentré par rapport à la salle de naissance).

Les pistes de réflexion et/ou d'amélioration

Réflexions et/ou améliorations sur les organisations :

L’accueil des nouveaux arrivants doit être plus formalisé et organisé : le contenu des informations et des compétences doit être inventorié, et le suivi de leur appropriation doit être organisé, avant de « lâcher » les professionnels de santé. Cette gestion des ressources humaines est primordiale pour maintenir un niveau de compétences optimales dans ces secteurs de soins spécifiques.

Il est également préconisé la constitution d’un classeur de protocoles spécifiques aux situations de soins en lien avec le secteur naissance, et plus précisément sur les situations d’urgences, classeur qu’il sera impératif d’expliquer aux nouveaux arrivants ; une évaluation concernant l’appropriation et la compréhension des informations transmises sera également organisée avant toute automatisation de tout acteur de santé.

Réflexions et/ou améliorations sur les procédures et protocoles de soins :

Il est décidé de constituer un « kit NITRONAL* » dans chaque salle de naissance (ampoule de NITRONAL*, ampoule de sérum physiologique de 10 ml, seringue de 10 ml, une aiguille et copie du protocole simplifié).

Ce kit sera positionné dans un tiroir identifié, et connu de tous.

La présence de ce kit sera vérifiée tous les jours dans le cadre d’une check-list garantissant que la salle de naissance est opérationnelle.

Cette décision a pris en compte le temps de préparation du médicament, temps qui n’est pas supérieur au temps nécessaire pour ramener la seringue stockée dans la salle de soins.

En conclusion

L’accueil et l’intégration des nouveaux arrivants dans un secteur sont primordiaux pour maintenir un niveau optimal de sécurité.

Cette procédure doit être réfléchie et construite collectivement, avec la présence dans le groupe de travail de professionnels anciens et nouveaux, les anciens maîtrisant les organisations et les situations de soins, les nouveaux pouvant exprimer les difficultés rencontrées. C’est l’association de tous ces éléments qui permettra d’être efficient dans cette démarche.

L’approche systématique dans la construction d’une organisation est importante.
 

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Un jeudi, veille d’un jour férié, 21h00. Mme Z., patiente de 85 ans, est adressée aux urgences par son médecin traitant pour un traumatisme de l’épaule consécutif à une chute à la maison. Elle s’est pris les pieds dans le tapis du salon et est tombée de sa hauteur sur la table basse.

  • Paramédical
Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 17/06/2020

Présentation du contexte

Cette patiente a comme antécédents une polyarthrite rhumatoïde, traitée principalement par méthotrexate 3 comprimés tous les jeudis matin.

Elle présente une vive douleur de l’épaule gauche et une incapacité à mobiliser le membre supérieur.

Elle est amenée par les pompiers, avec un courrier du remplaçant de son médecin traitant. Ce dernier, appelé par le mari de la patiente, a procédé au premier examen clinique, posant le diagnostic d’une fracture potentielle de l’épaule gauche.

Dans sa lettre de recommandation, il précise les antécédents de Mme Z., à savoir une polyarthrite rhumatoïde traitée par corticoïdes et méthotrexate (NOVATREX* 2,5 mg, 3 cp / jour).

L’urgentiste, qui a pris en charge cette malade, prescrit un bilan radiologique. L’imagerie médicale révèle alors une fracture déplacée de la tête humérale. L’hospitalisation est proposée à la patiente, qui l’accepte.

Le transfert en service de chirurgie orthopédique et traumatologique est organisé : l’équipe paramédicale est informée de l’arrivée de Mme Z., avec comme transmissions écrites sur un dossier format papier un traitement antalgique à adapter en fonction de l’évaluation de la douleur et la mention « suivre la prescription du médecin traitant », avec en pièce jointe le courrier du remplaçant du médecin traitant.

L’infirmière accueille la patiente dans le service et réalise son dossier de soins infirmiers : elle recopie le traitement sur la feuille de prescription, sans validation médicale. Le traitement de la patiente est mis sous séquestre, conformément à la procédure de l’établissement. Ne disposant pas de NOVATREX dans la pharmacie du service et pour éviter un dépannage compliqué pour le week-end de 3 jours, il est convenu avec la famille d’utiliser les médicaments sous séquestre.

Le chirurgien orthopédique de garde pose indique la pose d’une tête humérale. L’intervention est prévue pour le mardi suivant, le temps de commander et de réceptionner le Dispositif Médical Implantable, qui n’est pas en dépôt au sein de l’établissement.

La consultation pré-anesthésique est demandée pour le lundi matin.

Le bilan sanguin est prélevé le lundi matin, selon le protocole du séjour, afin que les résultats biologiques soient en possession du service au moment de la consultation d’anesthésie.

L’infirmière du jour en charge de la patiente signale au Médecin Anesthésiste Réanimateur une altération de l’état général de la patiente, avec une fièvre à 38°2 et le signalement par la patiente de nausées.

Le MAR examine la malade et les résultats biologiques du bilan du matin : les résultats sont en faveur d’une pancytopénie. L’examen de la pancarte montre la prise quotidienne de NOVATREX*, au lieu d’une prise hebdomadaire.

Mme Z. et sa famille sont prévenues de l’erreur d’administration et de la prise en charge spécifique envisagée.

La patiente est transférée en Unité de Surveillance Continue pour traiter les conséquences du surdosage en méthotrexate.

La patiente bénéficiera de l’intervention chirurgicale prévue avec 8 jours de retard.

Elle sortira de l’hôpital à J+23.

Conséquences

L’établissement de santé a dû :

- gérer une situation délicate de communication en lien avec l’erreur médicamenteuse,
- gérer une hospitalisation plus longue que prévue (une dizaine de jours),
- gérer une plainte potentielle de la patiente et de sa famille.

Méthodologie et analyse

Cette erreur d’administration a été un choc pour l’ensemble de l’équipe soignante. La déclaration de cet Evénement Indésirable Grave au sein de l’établissement a déclenché une analyse très rapide pour comprendre les raisons qui ont conduit à cet incident. La volonté de trouver des actions correctrices rapidement est une volonté des responsables de l’établissement.

Une analyse de risque a postériori est donc réalisée.

Dans cette analyse, seuls les éléments contributifs à la recherche des causes conduisant à cette erreur seront recherchés. La méthode ALARM est retenue.

  • Les facteurs contributifs discutés en équipe :

Facteurs liés aux patients 

La patiente présente une polyarthrite rhumatoïde, traitée depuis quelques semaines par corticoïdes et méthotrexate (NOVATREX*).

La fracture de la tête humérale ne met pas en jeu son pronostic vital.

La patiente ne connaissait pas bien son traitement. C’est son mari qui lui préparait son pilulier à la maison.

Facteurs liés aux tâches à accomplir 

La mise sous séquestre du traitement personnel de la patiente est protocolée et opérationnelle.

Le recopiage du traitement dans le dossier de la malade n’est pas autorisé, mais ce mode dégradé est utilisé quelquefois lorsque les patients sont accueillis la nuit. Ceci s’explique par le fait que le Dossier Patient Informatisé est mis en place dans l’établissement par étape, service après service. Le service de chirurgie est doté de cet outil, mais pas le service des urgences.
Il faut préciser que le traitement recopié était conforme aux éléments trouvés dans le dossier transmis par les urgences.

La validation médicale du traitement n’a pas eu lieu le lendemain. La visite du chirurgien n’a pas permis de vérifier les prescriptions de l’urgentiste. Pourtant, les équipes paramédicales du weekend ont dispensé les médicaments conformément aux éléments retranscrits sur la feuille de prescription. Les personnels interrogés ont reconnu que l’absence de validation médicale n’a pas été détectée.

Un focus particulier a été réalisé sur la typologie de cette fracture complexe et le chirurgien en charge du service ce weekend a communiqué avec son responsable pour valider l’indication.

Lors de ces différentes visites, la patiente n’a pas présenté de problèmes de santé particuliers, en sus de son traumatisme de l’épaule gauche.

Facteurs liés à l’individu (professionnel impliqué) 

Les personnels paramédicaux en poste lors de ce weekend prolongé étaient des professionnels de santé reconnus pour leurs compétences et en place au sein du service depuis plusieurs années.

L’infirmière de nuit qui a procédé à la retranscription des prescriptions n’a pas fait la nuit suivante et avait précisé qu’une validation médicale était nécessaire. Cette consigne n’a pas été prise en compte.

Facteurs liés à l’équipe 

La communication au sein du service est organisée. Les informations entre professionnels sont échangées lors des transmissions entre équipes. Ces périodes sont effectives et pérennes.

Les relations avec la famille étaient bonnes. La patiente et son conjoint ne connaissaient pas parfaitement les indications des médicaments pris. Ils avaient toute confiance dans les équipes soignantes quant à la dispensation des médicaments.

La patiente n’a pas présenté durant le weekend de manifestations cliniques en lien avec cette erreur de posologie.

La période de weekend correspond à des effectifs minimums : pas d’encadrement, pas de staff quotidien qui reprend les dossiers des entrants de la nuit.

Facteurs liés à l’environnement de travail 

Le traitement personnel de la patiente n’a pas été vérifié par l’urgentiste qui l’a prise en charge à son arrivée et notamment la posologie et la répartition des médicaments.

Le Dossier Patient Informatisé (D.P.I.) n’est pas déployé dans tous les services. La communication des éléments du dossier n’est pas aisée et oblige à des phases en mode dégradé d’un service équipé vers un service non équipé.

Les effectifs au sein du service de chirurgie étaient conformes au schéma d’organisation validé en cohérence avec ses activités et son capacitaire.

La charge de travail dans le service des urgences était très importante, du fait du début d’un weekend prolongé. Les effectifs médicaux et paramédicaux étaient habituels, mais les temps d’attente aux urgences étaient très supérieurs à la moyenne connue de ce service.

Facteurs liés à l’organisation et au management 

Le médecin urgentiste, qui a pris en charge la patiente, était un médecin intérimaire qui ne connaissait pas bien les organisations de travail de l’établissement. C’était sa première mission au sein de l’établissement.

L’équipe médicale était depuis plusieurs semaines en sous effectif, confrontée à deux départs de praticiens pour raisons personnelles (mutation – promotion).

Facteurs liés au contexte institutionnel 

Cet établissement de santé est organisé pour prendre en charge ce type de pathologie.

  • En résumé : les facteurs contributifs suivants sont retenus

- Une patiente qui ne connaît pas les objectifs du traitement dont elle bénéficie, et qui n’est pas actrice dans sa prise en charge.
- Un remplaçant de médecin traitant qui n’a pas donné les bonnes informations concernant le traitement de Mme Z.
- La mise sous séquestre du traitement personnel de la malade a été effective.
- Un traitement recopié sur la feuille de prescription par une infirmière par manque de disponibilité d’un médecin.
- Une transmission entre paramédicaux qui n’a pas été prise en compte.
- Un médecin urgentiste intérimaire qui ne maîtrise pas les organisations de l’établissement et qui ne prend pas le temps de s’informer auprès des professionnels de santé du secteur devant une charge de travail très importante.
- Une absence de contrôle médical du dossier d’une patiente entrée dans la nuit.
- Une absence de validation médicale des prescriptions de l’urgentiste en seconde intention par le médecin responsable du service.
- Un système d’information qui a mis en place un Dossier Patient Informatisé dans certains secteurs, et pas dans d’autres, avec un mode dégradé qui semble insuffisamment sécurisé.

Les pistes de réflexion et/ou d'amélioration

L’analyse de ces situations a orienté le Comité de Gestion des Risques à prendre les dispositions suivantes :

  • revoir les modalités de déploiement du Dossier Patient Informatisé, avec notamment un circuit du médicament sécurisé entre les services ayant déployé le DPI et les services ayant un dossier format papier.  
  • rappeler à tous les professionnels de santé les règles concernant les prescriptions médicales, et les rôles de chacun.  
  • revoir l’organisation des transferts patients entre le service des urgences et les services d’hospitalisation : une procédure a été rédigée pour préciser les éléments impératifs à respecter avant tout transfert.  
  • une sensibilisation de tous les professionnels de santé au sein de l’établissement, avec un rappel sur le caractère obligatoire des déclarations d’événements indésirables graves.

Conclusion

Une erreur médicamenteuse avérée ou presque tous les acteurs qui ont pris en charge cette patiente sont partie prenante.

Le modèle de REASON se vérifie une fois de plus :

  • le patient n’est pas acteur de son traitement et ne peut contrôler les médicaments qui lui sont dispensés.
  • les individus : - le médecin traitant introduit une erreur dans les éléments transmis à ses collègues hospitaliers, - le médecin urgentiste ne vérifie pas les éléments qu’il transmet à l’équipe soignante du secteur d’hospitalisation, - une infirmière qui recopie les prescriptions, - un chirurgien responsable du service pour le weekend qui ne vérifie pas les prescriptions pour les jours qui suivent.
  • l’équipe : une transmission qui n’est pas prise en compte entre équipe de nuit et équipe de jour (validation des prescriptions),
  • les protocoles : qui ne sont pas observés (recopiage des prescriptions),
  • les conditions de travail : une surcharge de travail aux urgences qui incite à se soustraire à des vérifications réglementaires.
  • l’organisation : la présence de médecin intérimaire qui ne maîtrise pas les organisations et notamment les modes dégradés mis en place dans l’établissement.

Cette analyse de situation systémique montre que cette erreur avérée n’est pas de la seule responsabilité d’un acteur de santé, avec le patient au bout de ce système complexe, qui en subit toutes les conséquences.

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