Il est important pour un généraliste de savoir référer à temps quand sa propre compétence et/ou son expérience lui apparaît insuffisante, y compris quand son client éleveur insiste pour qu’il pratique l’acte.
Des particuliers ont adopté un cochon miniature femelle.
Avant même l’adoption, une tentative d’ovariectomie avait été réalisée chez l’éleveur sans succès par son vétérinaire généraliste habituel dans le but de stériliser la jeune truie âgée de moins de deux mois. On ne sait rien des conditions de réalisation de cette intervention chirurgicale qui s’était soldée par un échec, les ovaires n’ayant pu être retirés. Avait été invoqué, pour justifier cet échec, le fait que "l’animal était trop petit et les ovaires non visibles" (sic) lors de cette première intervention.
Les adoptants souhaitent néanmoins que leur animal soit stérilisé. La femelle, alors âgée d’un peu plus de quatre mois, est présentée à un praticien exerçant dans une ville distante et ayant une activité spécialisée et une compétence reconnue dans le domaine des nouveaux animaux de compagnie.
Ils sont prévenus par celui-ci du risque d’adhérences péritonéales résultant de la première tentative opératoire.
Effectivement, lors de l’intervention, pratiquée selon les règles de l’art, (c’est -à-dire dans des conditions de qualité et de sécurité sans rapport aucun avec celles engagées lors de la première intervention), le risque annoncé se réalise, au-delà même de ce qui avait pu être imaginé : les adhérences et brides péritonéales étaient nombreuses et très importantes. L’ovaire gauche est apparu inaccessible à partir d’une laparotomie médiane (abord par la ligne blanche) ; la tentative d’accéder à la région de l’ovaire droit a rapidement entraîné, par traction d’une bride, une petite ouverture du côlon. Celui-ci a été suturé et le praticien a dès lors choisi, en raison du risque, de renoncer à la démarche de stérilisation chirurgicale. Il n’y a eu aucune complication postopératoire.
Il était simplement constaté un second échec d’intervention. Une stérilisation médicale a été conseillée et réalisée (pose annuelle d’implant hormonal).
Le risque vital à long terme dû aux adhérences péritonéales est d’abord et avant tout très probablement lié à la première opération et non à la seconde. Il est lié aussi à l’absence de stérilisation chirurgicale majorant le risque de cancer et/ou d’infection utérine.
Étonnamment, les nouveaux propriétaires de l’animal se sont retournés contre le second chirurgien alors que le premier praticien n’a jamais été mis en cause par l’éleveur. Ils ont été déboutés de leur demande de dédommagement en responsabilité civile professionnelle dès lors que leur consentement avait été donné sans ambiguïté pour un risque de difficulté opératoire annoncé.
L’échec de la seconde tentative opératoire a été considéré comme événement indésirable (EI) par les adoptants : ignorant ou voulant ignorer les conséquences du premier acte chirurgical et n’ayant pas pris conscience du risque opératoire de la réintervention, ils ne s’attendaient pas à un échec possible de l’intervention dans une clinique spécialisée.
Refusant de régler la seconde opération puisqu’elle avait échoué sur le but à atteindre, à savoir de rendre la femelle stérile, l’événement a pris l’allure d’un litige et est apparu pour tous les acteurs comme un EI au cours des soins.
L’EI est ici d’abord et avant tout la péritonite chronique, avec adhérences viscérales et brides, initiée par la première intervention mal conduite et infructueuse.
Les particuliers amateurs peuvent se tromper sur l’appréciation et l’évaluation tant des éleveurs vendeurs que de leurs vétérinaires.
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